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L'article provient de 24 heures

Démystifier la phalloplastie: un homme trans se confie sur la construction de son pénis

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Photo portrait de Sarah-Florence  Benjamin

Sarah-Florence Benjamin

2023-09-21T18:30:57Z
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En 2016, Dominik Thibeault a subi une phalloplastie, c’est-à-dire qu’il s’est fait construire un pénis. Sur TikTok, l’homme trans informe sa communauté sur cette chirurgie méconnue du grand public. 24 heures s’est entretenu avec lui. 

La phalloplastie est une intervention qui se déroule en trois étapes distinctes: la construction du phallus, la connexion de l’urètre et l’installation de la pompe permettant d’avoir des érections.  

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Même si Dominik Thibeault est passé à travers ces trois opérations, certaines personnes s’arrêtent après la première ou la deuxième. Il faut aussi savoir qu’avant l’opération, c’est impossible de connaître la taille ou l’apparence du futur pénis. «Ça va beaucoup dépendre de comment se passe la guérison», précise-t-il.  

Construction du phallus 

Lors de la première étape, deux couches de peau sont prélevées sur un avant-bras pour construire le phallus. «On retire aussi une artère du bras qui va aller dans le pénis, puis on le connecte [le pénis] par les nerfs au clitoris, ce qui va permettre d’avoir des sensations dans le membre, si tout se passe bien», explique l’homme de 30 ans.  

«Au début, tu ressens du plaisir surtout à la base du phallus, là où il y avait le clitoris. Avec le temps, ça progresse vers le bout», poursuit-il, précisant que la guérison prend au minimum trois mois.   

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À cette étape, l’ouverture du vagin est refermée et les lèvres de la vulve sont utilisées pour former ce qui deviendra le scrotum.  

Connexion de l’urètre 

La deuxième étape consiste à refermer l’urètre original, sous le pénis. Le bout du nouveau phallus est ensuite percé et ce trou est connecté à l’ancien urètre pour permettre d’uriner par le pénis. Sans cette étape, la personne devra continuer d’uriner assise, précise Dominik Thibeault. 

Insertion de la pompe 

Lors de la troisième et ultime étape de la phalloplastie, la personne se fait installer une pompe qui lui permettra d’obtenir et de maintenir une érection. La pompe est branchée à un réservoir d’eau stérile dans l'aine.  

«Pour avoir une érection, il faut appuyer sur son testicule. Ça envoie l’eau dans le pénis pour le gonfler. Pour le dégonfler, on pèse sur un petit bouton sur le côté [du testicule]. Au début, je trouvais ça spécial, ça fait du bruit, ça prend tu temps, mais on s’habitue», confie le jeune homme. Il explique que ce type de mécanisme d’abord conçu pour les hommes cisgenres qui souffrent de dysfonction érectile ne fonctionne pas toujours bien dans un pénis de phalloplastie.  

Plutôt qu’une pompe, il est d’ailleurs possible d’installer des tiges semi-rigides dans le phallus. «Ça donne un look semi-bandé en tout temps, mais on peut le placer soi-même si on veut avoir une érection et c’est plus simple», illustre-t-il.  

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Des complications possibles 

Dominik Thibeault a connu son lot de complications lors des différentes étapes de sa phalloplastie.   

«Après la connexion de l’urètre, deux endroits ont mal guéri, et ça a fait des fistules. Quand j’urinais, ça sortait par trois trous, j’avais l’impression d’être une passoire», se souvient celui qui habite à Gatineau.  

«Puis, après un moment, mon urètre, au bout du pénis, s’est refermé. Je ne pouvais plus aller à la toilette et ça s’accumulait dans mes testicules. J’ai dû aller à Montréal d’urgence pour me faire percer l’urètre de nouveau, à froid», poursuit-il.  

@dom.thib

C'est vraiment intense les opérations des fois ahahahXD Au moin, tout est bien qui fini bien !!

♬ son original - Dom.thib

Avant la première et la deuxième opération, il faut absolument faire des traitements d’électrolyse sur la zone de peau retiré sur l’avant-bras et dans le trou de l’urètre original. Dominik Thibeault avoue être passé outre la deuxième ronde de traitement, ce qui lui a causé de sérieux ennuis.  

«Mon poil s’est mis à repousser à l’intérieur de mon urètre, tellement que ça a fait des boules de poil. Je sentais des bosses sous la peau de mon pénis. Avec le temps, les boules sont devenues dures comme de la roche et ça risquait de tout bloquer. J’ai dû les faire retirer», explique-t-il.  

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Et si c’était à refaire? 

L’expérience de Dominik Thibeault peut faire peur, mais il ne regrette aucunement sa phalloplastie.  

«J’ai pris quatre ans pour me décider à faire la phalloplastie. J’avais des craintes et je ne me sentais pas prêt. Un jour, il y a eu un déclic, et c’est devenu une évidence. Tout à coup, c’était ce que je voulais profondément. J’avais vraiment hâte que ça se passe.» 

S’il a un conseil à donner aux gens qui hésitent, c’est de le faire pour eux, et pour eux seulement.  

«Il ne faut jamais se presser pour le regard des autres et il faut être patient. Je ne cacherai pas que ça prend du temps et beaucoup de travail», insiste-t-il.   

«Maintenant, je me sens heureux et en harmonie. Ça m’a pris du temps à réapprendre à m’accepter. Il a fallu que je me débarrasse de ce que les autres pensaient de moi. Aujourd’hui, je peux dire que je suis un gars, c’est juste mon parcours qui est différent.» 

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Pourquoi parler de sa phalloplastie sur TikTok? 

«J’ai perdu un ami proche qui avait vécu quelque chose de similaire», raconte Dominik Thibeault.  

«Je voyais sans cesse des nouvelles de jeunes personnes trans qui s’enlevaient la vie et je me sentais impuissant. C’est là que j’ai décidé que j’allais en parler. Je voulais aider les gens.» 

Depuis maintenant près de deux ans, sur TikTok, le jeune homme dans la trentaine répond ainsi aux questions qu’on lui pose sur la transidentité et son expérience. «Si je peux aider ne serait-ce qu’une personne, ça vaut la peine», dit-il.   

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@dom.thib Réponse à @haikyoo_00 Faire une transition, ce n'est pas une course. C'est important de respecter notre vitesse d'acceptation et nos propres limites. #canada #quebec #trans #hommetrans #transgenre #lgbttiktok #lgbtquebec ♬ son original - Dom.thib

La phalloplastie est-elle couverte par la RAMQ?  

  • La procédure en tant que telle est remboursée par le Régime d’assurance maladie du Québec (RAMQ) lorsqu’elle s’inscrit dans une démarche d’affirmation de genre.  
  • Pour être éligible à la phalloplastie, il faut avoir subi une hystérectomie. Cette procédure, qui consiste à retirer l’utérus, les ovaires et les trompes de Fallope, est aussi couverte par la RAMQ. 
  • Avant de pouvoir accéder à la phalloplastie, il faut également présenter au médecin une lettre signée par un(e) psychologue ou sexologue attestant que l’intervention est nécessaire. Ce service n’est pas couvert par la RAMQ. 

SI VOUS AVEZ BESOIN D’AIDE   

Ligne québécoise de prévention du suicide

www.aqps.info 

• 1 866 APPELLE (277-3553)    

Jeunesse, J’écoute

www.jeunessejecoute.ca 

• 1 800 668-6868    

Tel-jeunes

www.teljeunes.com 

• 1 800 263-2266

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