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L'article provient de TVA Nouvelles
Monde

Début d'un procès historique, six ans après la nuit de terreur du 13 novembre 2015

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Agence France-Presse

2021-09-08T09:31:45Z
2021-09-08T19:23:36Z
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«On est traités comme des chiens»... Le procès des attentats du 13 novembre 2015 a débuté mercredi à Paris, six ans après une nuit d'horreur qui a fait 130 morts et traumatisé la France, par un coup de sang du principal accusé, Salah Abdeslam.

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La première journée d'audience s'est terminée dans la soirée, aux environs de 20h30 (18h30 GMT), et reprendra jeudi à 12h30 (10h30 GMT), toujours avec l'appel des victimes (parties civiles) de ce dossier titanesque.

Pendant de longues heures mercredi, la cour d'assises spéciale a procédé à un impressionnant et fastidieux recensement, par ordre alphabétique, des près de 1800 personnes souhaitant faire reconnaître leur qualité de victime de ces attentats, les pires de l'après-guerre en France.

Muet pendant toute la durée de l'enquête, Salah Abdeslam, seul membre encore en vie des commandos qui ont fait 130 morts et des centaines de blessés à Paris et Saint-Denis, s'est cette fois fait entendre.

AFP
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Vers 17h30, après une brève suspension liée au malaise d'un de ses coaccusés, Salah Abdeslam a interrompu le président de la cour, Jean-Louis Périès, pour se lancer dans une vindicte, dénonçant ses conditions de détention et celles des dix autres hommes dans le box.

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«On est traités comme des chiens. Ici (dans la salle d'audience) c'est très beau, il y a des écrans plats, de la clim, mais là-bas derrière...», a lancé le Franco-Marocain de 31 ans, l'index pointé vers le président.

«Ça fait six ans que je suis traité comme un chien et je ne me suis jamais plaint», a aussi déclaré l'accusé, incarcéré depuis plus de cinq ans à l'isolement total, suivi 24h sur 24 par vidéosurveillance.

Avant que le président ne l'arrête à son tour: «Ici on n'est pas dans un tribunal ecclésiastique, on est dans un tribunal démocratique».

 

À l'ouverture de l'audience, t-shirt noir, cheveux sombres mi-longs coiffés en arrière et barbe noire, il avait paraphrasé la profession de foi musulmane, déclarant «qu'il n'y a pas de divinité à part Allah et que Mohamed est son messager» alors qu'on lui demandait son identité. «On verra ça plus tard», lui a répondu le président Jean-Louis Périès, qui lui a ensuite demandé sa profession.

Il a alors répondu avoir «délaissé toute profession pour devenir un combattant de l'État islamique».

Tension palpable     

Dix autres accusés se sont aussi installés sur la première rangée des bancs du box, sous l'escorte de nombreux gendarmes. Trois autres accusés, qui comparaissent libres, sont eux assis hors du box.

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Contrairement à Salah Abdeslam, tous se sont contentés de décliner leur identité et de répondre aux questions sans faire de commentaire.

Aux alentours et à l'intérieur de la grande salle de 47 mètres de long et 550 places, la tension était palpable en cette première journée d'audience, consacrée à l'appel des parties civiles. Cet appel continuera jeudi, avant la lecture du rapport vendredi. Les premiers témoins sont attendus à la barre lundi.

Les victimes et proches sont peu présents dans la salle: seule une centaine a pris place au fond, loin derrière une forêt de robes d'avocats des parties civiles.

Pendant neuf mois - la plus grande audience criminelle jamais organisée en France -, la cour va se replonger dans ce titanesque dossier. Il est inédit par son ampleur - 542 tomes -, par son nombre de parties civiles - au moins 1800 -, et par sa charge émotionnelle.

Les témoignages de rescapés et proches des victimes débuteront le 28 septembre, pour cinq semaines.

«On sait» qu'à cette occasion, «c'est une vague d'émotion qui déferle, les faits remontent à la surface», disait avant l'audience Philippe Duperron, dont le fils de 30 ans a été mortellement blessé au Bataclan, et qui s'exprimera comme président de l'association de victimes 13onze15.

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«Intensité dramatique»     

Le vendredi 13 novembre 2015, la nuit de terreur avait débuté à 21h16: trois kamikazes se font exploser aux portes du Stade de France, pendant une rencontre amicale de football entre la France et l'Allemagne.

Au coeur de Paris, deux commandos de trois hommes mitraillent à l'arme de guerre des terrasses de cafés et de restaurants et tirent sur la foule d'un concert au Bataclan, où l'assaut sera donné peu après minuit.

De façon inhabituelle, le président de la cour d'assises spéciale - composée uniquement de magistrats professionnels - a souhaité tenir un propos liminaire, «en toute humilité».

«Nous commençons ce jour un procès qualifié d'historique, hors-norme», dit à la salle Jean-Louis Périès. Mais, prévient-il, «ce qui importe c'est aussi justement le respect de la norme, le respect des droits de chacun, à commencer par les droits de la défense».

«Notre cour d'assises a pour finalité d'examiner les charges pesant à l'encontre de chacun et d'en tirer toutes les conséquences au plan pénal après avoir écouté chacun», a-t-il rappelé. «Nous devons tous garder à l'esprit cette finalité afin de conserver ce cap».

«Ce procès promet d'être chargé en émotions, la justice se devra toutefois de les tenir à distance si elle ne veut pas perdre de vue les principes qui fondent notre État de droit», mettaient aussi en garde avant l'audience les avocats de Salah Abdeslam.

Dans la matinée, sous l'oeil des caméras, un convoi ultrasécurisé avait quitté la prison de Fleury-Mérogis, où Salah Abdeslam est depuis plus de cinq ans incarcéré à l'isolement total.

La cour d'assises spéciale juge au total 20 accusés, soupçonnés d'être impliqués à divers degrés dans la préparation des attaques.

Six accusés sont jugés par défaut, dont le donneur d'ordres et vétéran du jihad Oussama Atar, et les «voix» françaises de la revendication de l'EI, les frères Fabien et Jean-Michel Clain, tous trois présumés morts en Syrie.

Près d'un millier de membres des forces de l'ordre sont mobilisés pour la sécurité du procès, dont 630 aux abords du palais et à l'intérieur, selon l'Intérieur.

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