De moins en moins de bornes de recharge gratuites au Québec
Marie-Laurence Delainey
De plus en plus d’entreprises et de commerces partout au Québec retirent la gratuité des bornes de recharge pour voitures électriques aux clients et aux employés afin d’éviter les abus de certains utilisateurs qui monopolisent les stations.
Selon de nombreux commerçants et experts un peu partout au Québec à qui nous avons parlé, la tendance est la même: vous devrez plus souvent sortir votre portefeuille pour utiliser une borne de recharge.
«Ils pensent que c’est des stationnements VIP, c’est de l’égoïsme», résume Sylvain Juteau. Le président de Roulez électrique n’a eu d’autre choix que d’installer un système de paiement sur la totalité de ses bornes à Trois-Rivières. «Il n’y avait plus de respect, ils restaient stationnés 24 heures, même après avoir terminé la charge. [...] C’est dommage», dit-il.
Au supermarché Metro à Sainte-Julie, en Montérégie, les bornes de recharge sont toujours gratuites, mais certains en abusent aussi, admet le directeur adjoint, Benoit Carmel. «On arrive tôt, on part tard, on voit ceux qui laissent leur voiture longtemps. [...] Parfois, on doit mettre des mots dans leur vitre, car ils laissent la voiture à l’heure du souper et reviennent la prendre le lendemain. C’est important pour nous d’offrir ce service pour le client, on essaie d’éduquer.»
L’immeuble voisin de l’épicerie, qui abrite entre autres une clinique médicale, a rendu ses bornes, autrefois gratuites, payantes. Selon nos informations, de nombreux automobilistes qui n’étaient pas clients de l’endroit venaient s’y brancher soirs, nuits et week-ends.

Peu importe la raison, la proportion de stations gratuites est en baisse depuis au moins deux ans au Québec. Selon ChargeHub, une application qui collige le nombre et le type de bornes selon les données fournies par les entreprises de bornes électriques, environ 24% des bornes étaient gratuites au Québec en 2023 contre 17% actuellement.
«C’était correct au début, les rendre gratuites. Quand il y avait mille électromobilistes au Québec, que 10% abusaient, ça n’en faisait pas beaucoup, on est rendus près de 400 000, ça commence à représenter un sérieux problème», explique Martin Archambault, producteur du balado Silence on roule.

Brancher son véhicule électrique à une borne standard coûte en moyenne entre zéro et cinq dollars l’heure, selon les réseaux. La quasi-totalité des bornes du Circuit électrique, le réseau d’Hydro-Québec (HQ), est payante. «Il est normal d’appliquer un tarif de recharge puisque c’est un service offert qui nécessite des investissements qui vont de quelques milliers [...] à quelques centaines de milliers de dollars», explique le porte-parole d’HQ Louis-Olivier Batty.
Des employés pénalisés
Parfois, c’est le personnel qui est pénalisé parce que des électromobilistes exagèrent. «Des entreprises offraient des bornes gratuites pour les employés, mais il y a des gens de l’externe qui s’y branchaient, alors maintenant, elles sont payantes», remarque Steve Durocher, le directeur des ventes pour la région de Lanaudière d’une entreprise qui installe des bornes, Beq Technology.
L’entreprise Nordia, à Laval, spécialisée dans le service à la clientèle, a trouvé une autre solution. Les bornes à l’usage exclusif des employés sont gratuites, mais accessibles uniquement grâce à une carte d’accès destinée au personnel.