France : l’exécutif tente d’apaiser la colère des enseignants à trois mois de la présidentielle
AFP
Une grande partie des enseignants de France, exaspérés par la gestion gouvernementale de l’épidémie de Covid-19 à l’école, ont fait la grève jeudi, un mouvement qui pourrait fragiliser le président Emmanuel Macron à trois mois de l’élection présidentielle.
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Une grande partie des enseignants de France, exaspérés par la gestion gouvernementale de l’épidémie de la COVID à l’école, ont fait la grève jeudi, un mouvement qui pourrait fragiliser le président Emmanuel Macron à trois mois de l’élection présidentielle.
L’ensemble des syndicats de l’Éducation nationale, des professeurs aux inspecteurs et chefs d’établissements, avaient appelé à cette mobilisation, dénoncent «une pagaille indescriptible» dans les établissements scolaires en raison de la cinquième vague épidémique et des protocoles sanitaires qu’elle implique.
Près de 38,5 % des enseignants ont fait grève jeudi dans les écoles maternelles et élémentaires, selon le ministère de l’Éducation, et 75 % selon le SNUipp-FSU, premier syndicat du primaire, qui a annoncé une école sur deux fermée et évoqué «une mobilisation historique».
Dans les collèges et lycées, 23,7 % des enseignants étaient mobilisés, selon le ministère. Le Snes-FSU, premier syndicat du second degré, a lui avancé le chiffre de 62 % de grévistes.
Le mouvement a été soutenu dans la rue par quelque 136 manifestations qui ont rassemblé près de 78 000 personnes (77 500) en France, dont 8 200 à Paris, selon le ministère de l’Intérieur.
À Paris, les syndicats ont été reçus en fin d’après-midi, à leur demande, par le premier ministre Jean Castex, en présence du ministre de l’Education Jean-Michel Blanquer. Son collègue de la Santé Olivier Véran, tout juste testé positif au Covid, était connecté en visioconférence. La rencontre était toujours en cours aux alentours de 20H15.
«Ce n’est pas un rendez-vous symbolique que l’on demande à Matignon aujourd’hui, mais le début d’une véritable négociation pour des réponses rapides et concrètes sur le volet sanitaire, avec des remplaçants en plus notamment, mais aussi la revalorisation des salaires», a prévenu le secrétaire général de la fédération du syndicat Force ouvrière pour l’enseignement (FNEC FP-FO), Clément Poullet.
«Garderie»
«Trois protocoles en dix jours, c’est n’importe quoi. On ment aux parents, car c’est une garderie qui est ouverte actuellement», a témoigné de son côté Anne Gau-Segonzac, 59 ans, directrice d’une école élémentaire de Montrouge (Hauts-de-Seine).
Pour Maxime, 20 ans, assistant d’éducation (AED) depuis deux ans au lycée Joliot-Curie de Nanterre (Hauts-de-Seine), «avec tout ce qu’on nous demande de faire pour la gestion de la crise sanitaire (...), on ne peut plus assurer nos missions».
Le gouvernement se félicite lui que la France soit un des pays qui a le moins fermé les écoles pendant la pandémie, malgré les difficultés.
Depuis le retour en classe après les fêtes de Noël, les écoles vivent au rythme d’un nouveau protocole sanitaire qui nécessite une multiplication des tests et qui a changé à plusieurs reprises en 10 jours.
Un dispositif compliqué, alors que les cas se multiplient et entraînent la fermeture de milliers de classes parmi les 527 000 que compte la France.
La tension monte, cristallisée notamment sur le ministre de l’Education Jean-Michel Blanquer, accusé de «mépris» et d’«autoritarisme» envers le personnel enseignant, et dont une partie des manifestants ont demandé la démission.
M. Blanquer a provoqué la colère en annonçant seulement à la veille de la rentrée scolaire et via la presse le protocole sanitaire. Puis en affirmant qu’on ne faisait «pas grève contre un virus».
La dernière mobilisation massive dans l’Éducation nationale française remonte à mai 2003, pour protester contre une réforme des retraites.
Le mouvement tombe mal pour le président Macron, quasi-candidat et toujours favori des sondages, à trois mois du premier tour de la présidentielle.
«Jusqu’à maintenant, les Français considéraient que le gouvernement et le président Macron avaient géré correctement la crise», mais si la grève est massive avec d’importantes perturbations, «cet équilibre risque de se rompre», a indiqué à l’AFP le politologue Brice Teinturier (Ipsos).
Les candidats à la présidentielle des partis d’opposition s’en sont donné à cœur joie ces derniers jours pour dénoncer le «chaos généralisé dans l’école», ou réclamer la démission de M. Blanquer.
En France, la moyenne des contaminations quotidiennes par la COVID sur les sept derniers jours est de 287 603 cas, contre 198 200 il y a une semaine.