Près de 2000 itinérants sortis de la rue en un peu plus de 5 ans: Aliou Karimou nous raconte son histoire
Guillaume Cyr
Aliou Karimou fait partie des 1829 itinérants à être sortis de la rue depuis 2015 grâce au Mouvement pour mettre fin à l’itinérance à Montréal (MMFIM).
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Originaire du Bénin, l’homme de 30 ans est arrivé au Québec en 2016. Au départ, tout va pour le mieux: il étudie dans un collège et il habite avec sa copine de l’époque. Mais en août 2020, tout bascule.
La descente aux enfers
Sa mère, qui habite toujours dans son pays natal, contracte la tuberculose et tombe gravement malade. Pour lui venir en aide financièrement, il multiplie les heures de travail. Il retourne finalement au Benin avec ses proches. Le stress prend le dessus et il développe des troubles de santé mentale.
À son retour à Montréal, rien ne va plus. Il se sépare de sa copine de qui il ne peut plus s'approcher, selon un ordre de la cour. Puis, il se retrouve à la rue.
«C’était vraiment difficile. Où dormir? Je ne savais pas où aller, où me rendre. J’étais toujours dans la rue», raconte l’homme, qui a vécu difficilement les premiers mois de pandémie.
Après avoir dormi dans des garages près du métro Frontenac pendant un mois, il est admis l’hôpital Albert-Prévost, pour traiter ses troubles de santé mentale.
Il s’est sorti de la rue
Avec le soutien de l’organisme Diogène, qui aide les personnes vivant en situation d’itinérance aux prises avec des problèmes de santé mentale, il parvient à se trouver un appartement. Depuis février, il habite un 3 1⁄2 dans Rosemont–La-Petite-Patrie.
Depuis 2015, Diogène a sorti 210 personnes itinérantes, comme Aliou Karimou, de la rue, en leur donnant une deuxième chance, affirme la coordonnatrice générale de service de l’organisme, Jessica Soto. Diogène assume 75% du prix du loyer que paie Aliou Karimou.
Dans les dernières années, l’organisme a tissé des liens avec des propriétaires qui acceptent de louer des logements à des personnes sans-abri. Mais avec la crise du logement et les hausses du prix des loyers, c’est de plus en plus difficile de trouver des appartements, regrette Mme Soto.
Pour pouvoir profiter du programme, il n’y a que deux conditions à respecter:
- Rencontrer un intervenant une fois par semaine;
- Accepter de verser 25% de ses revenus à l’organisme qui s’occupe de payer le loyer. Le montant restant est assumé par l’organisme.
Les personnes qui ont une dépendance aux drogues ou à l’alcool ne sont pas obligées d’arrêter de consommer pour bénéficier de ce programme d’aide.
2000 itinérants en cinq ans
Cette initiative de Diogène s’inscrit dans la mission du Mouvement pour mettre fin à l’itinérance à Montréal, qui s’était donné comme objectif de loger 2000 itinérants dans des appartements abordables et sécuritaires avant la fin de 2020. L’organisme y est presque arrivé: avant la fin de 2020, 1829 itinérants avaient été logés.
Ces résultats ont été rendus publics il y a quelques jours par le MMFIM.
«Nous voulons poursuivre avec notre objectif de loger les personnes en situation d'itinérance mais nous n'avons pas encore chiffré notre objectif», a indiqué la directrice générale du MMFIM, Michèle Chappaz, en ajoutant que le projet se poursuivra jusqu'en mars 2022.
La stratégie semble d’ailleurs porter ses fruits, puisque 75% de ces anciens itinérants ne sont pas retournés à la rue. Sur les 210 personnes soutenues par Diogène, une trentaine ont perdu leur appartement.
Prochaine étape pour Aliou Karimou: retourner sur le marché du travail. Celui qui aime bien cuisiner pendant ses temps libres aimerait décrocher un emploi en informatique. «Je vais prendre mon mal en patience pour que tout rentre dans l’ordre», lance le trentenaire, souriant malgré tout.