Coderre veut repenser le REV Bellechasse
Félix Lacerte-Gauthier
Le candidat à la mairie de Montréal Denis Coderre s’engage à revoir le Réseau express vélo (REV) de la rue de Bellechasse s’il est élu, afin de le rendre «socialement plus acceptable».
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«Si on laisse ça comme [des] commerces vont fermer. On a besoin de cohabitation et de respect», a dit M. Coderre au cours d'un point de presse mercredi.
Il pointe notamment le fait que les véhicules de livraison n’ont aucun endroit où s’arrêter légalement sur la rue, et que plusieurs s’installent sur la piste cyclable pour débarquer leurs marchandises.
Pendant les 45 minutes qu’a duré son point de presse, davantage de voitures se sont engagées en direction contraire du sens unique (4), qu’il n’y a eu de vélo sur le REV (1), un détail que ne manque pas de faire remarquer M. Coderre.
«Quand il y a des personnes âgées qui veulent débarquer, mais qui ne sont capables, parce que malheureusement, il y a aussi un problème de protéger les plus vulnérables, ça aussi, ça doit être notre priorité. On est capable de faire les choses autrement sans tomber dans l’excès», a ajouté M. Coderre.
Selon ses plans, à l’ouest de la 1re avenue, le REV restera tel qu’il est présentement. À l’est, toutefois, Ensemble Montréal créera une piste unidirectionnelle, ce qui permettra, selon le parti, de rétablir une partie des 822 places de stationnement perdues. Le sens unique de la rue sera néanmoins maintenu.
Dans le secteur est, une seconde piste cyclable se retrouve deux rues au nord du REV, sur la rue Saint-Zotique.
M. Coderre a également dénoncé le fait qu’aucune information sur la perte de ces espaces n’ait été divulguée au moment de la mise en place du projet, et reproche à l’administration actuelle d’être allée de l’avant sans consultation.
«Il y a des adeptes de vélo, et j’en suis un, mais il faut trouver un équilibre», estime M. Coderre.
Par ailleurs, Ensemble Montréal s’est engagé à maintenir le REV Saint-Denis tel qu’il a été réalisé, ainsi qu’à terminer sa sécurisation pour les cyclistes.
Un comité de mobilité sera également mis sur pied afin d’analyser et de donner une orientation globale à la circulation dans l’arrondissement de Rosemont–La Petite-Patrie.
Projet Montréal réagit
Conseiller municipal et candidat à la mairie de Rosemont–La Petite-Patrie pour Projet Montréal, François Limoges a réagi à la promesse faite par M. Coderre.
«Il est prêt à sacrifier la sécurité des Rosemontois pour faire des gains électoraux. Ce réseau-là, il sauve des vies, et il change complètement la façon dont les gens ont de se déplacer dans l’arrondissement», a soutenu M. Limoges.
Selon lui, il n’est pas possible de remettre du stationnement tout en gardant la piste cyclable, estimant que sous sa forme actuelle, le REV est la «bonne solution», bien que d’éventuels enjeux de sécurité pourraient être corrigés.
Il est également revenu sur l’accusation que la population n’a pas été consultée pour le projet. «Le REV a été un engagement électoral très clair. Je pense qu’un scrutin, c’est une forme de consultation. L’idée d’un réseau structurant et sécurisé était demandée par de nombreux groupes», a-t-il soutenu.
Remettre la situation en contexte
Pour Jean-François Rheault, PDG de Vélo Québec, il faut remettre l’annonce dans le contexte de l’arrondissement de Rosemont – La-Petite-Patrie.
«Polytechnique a fait une étude en 2021, qui dit que l’espace utilisé par les pistes cyclables, c’est 2,5%. Ça reste assez marginal quand on regarde la globalité de l’arrondissement», a-t-il expliqué.
Il ajoute également que de façon générale, les pistes cyclables les plus sécuritaires sont celles qui sont unidirectionnelles.
«Ça permet à plusieurs types d’utilisateurs de cohabiter. On peut avoir des dépassements et on a un sentiment de confort et de sécurité», a-t-il ajouté.
Il est également revenu sur la question des livraisons, qu’il juge «légitime».
«Par contre, si on rajoute du stationnement pour les voitures, on ne règlera pas le problème des livraisons. Il y aura des autos stationnées et il n’y aura pas plus de place pour s’arrêter», a rappelé M. Rheault.
Un commerçant qui doit fermer
Près du point de presse, Giovanni Di Fruscia écoutait attentivement. Il a récemment mis en vente sa cordonnerie, qui avait pignon sur la rue de Bellechasse depuis 65 ans. La faute, selon lui, au REV qui a fait baisser son nombre de clients de 75 %.
«Je l’avais ouvert avec mon père, et mon garçon avait suivi après moi. Trois générations. Mais avec ce qu’ils ont fait, ils ont tué notre rue complètement», s’est-il désolé.
M. Di Fruscia reproche également au maire de l’arrondissement, François Croteau, de ne pas avoir écouté les résidents du secteur.
«Il n’a jamais voulu me parler. J’ai été [à l’hôtel de ville], il n’a jamais voulu me donner ses heures de bureau. J’ai laissé 10 messages, il ne m’a jamais rappelé. Il répondait à tous ceux qui étaient en faveur [du REV], mais ceux qui étaient contre, il ne voulait rien savoir», a dénoncé le cordonnier.