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Culture

Charles Lafortune et Sophie Prégent ont un plan à long terme pour leur fils quand ils ne seront plus là

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Daniel Daignault

2023-04-25T12:00:00Z
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Il est toujours intéressant de discuter avec Charles Lafortune. Les sujets ne manquent pas: on peut parler de son rôle d’animateur à La Voix, du poste qu’il occupe à la maison de production Pixcom, de sa vie de couple et familiale avec Sophie et leur fils, Mathis, ou encore de la Fondation Autiste & majeur. C’est exactement ce qu’on a eu l’occasion de faire! On a abordé tous ces sujets à l’occasion d’une rencontre de presse tenue pour annoncer un partenariat fort intéressant entre le Groupe St-Hubert et la fondation mise sur pied par Sophie et Charles.

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Charles, tout d’abord, La Voix vient tout juste de se terminer. Est-ce que ç’a été encore une fois une belle aventure?

J’étais fébrile avant de commencer! Ça faisait trois ans, depuis 2020, que je n’avais pas fait La Voix. Ç’a été une belle édition. C’est l’année où il y a eu le plus de diversité. Ç’a été la version la plus représentative de ce qu’est la société d’aujourd’hui. 

Est-ce que ç’a été exigeant?

Je deale bien avec cet horaire-là et j’ai eu du plaisir à faire ça. Mon rôle d’animateur est pas mal restreint — je suis plus producteur dans la vie —, mais je l’apprécie beaucoup. C’est toujours excitant de faire les directs; aujourd’hui, il ne se fait pas beaucoup de télé en direct. 

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Tu parlais d’inclusion... Il en est beaucoup question depuis un certain temps. Dirais-tu que depuis 5 ou 10 ans, les gens sont plus sensibilisés à la cause de l’autisme?

Oui. Il y a beaucoup de diagnostics: on parle d’un enfant sur 68 au Québec. Ils sont mieux diagnostiqués aussi; des formes plus légères sont identifiées. Quand tu fais le tour de tes connaissances, ce n’est pas long que tu réalises que tu connais quelqu’un qui connaît quelqu’un qui a un enfant autiste. À un moment donné, quand je suis devenu producteur, je me suis dit que j’allais en parler, parce que je voulais faire quelque chose pour cette cause. C’est ainsi que la série Autiste, bientôt majeur est née et qu’Autiste, maintenant majeur a suivi. On est là-dedans. On en est à la quatrième saison.

De plus, Sophie et toi avez mis sur pied la fondation...

On voulait qu’il y ait quelque chose de concret. On n’est pas Ricardo, on ne va pas faire 21 saisons d’Autiste! De là est née l’idée de la Fondation Autiste & majeur qui a été lancée en 2019. Louis et Véronique font du logement, et la Fondation Yvon Lamarre en fait aussi à Montréal, et nous, on a voulu être dans les services. On s’est demandé ce qui manquait aux enfants autistes, où ils allaient quand ils se levaient, ce qu’ils faisaient. Tu vois, Mathis, je sais où il est: il est aimé et il travaille à son rythme. Aujourd’hui, pendant qu’on se parle, il fait du bénévolat et, grâce à une application, je peux voir précisément ce qu’il fait. Je peux même prendre des photos et les lui montrer le soir. Donc, le but de la fondation est de permettre aux enfants adultes de continuer à s’épanouir. Sophie et moi, on voulait redonner et surtout amener des gens à s’impliquer dans cette cause-là. Il y a Québecor, la Fondation St-Hubert, Pastene, Desjardins, la Fondation JA DeSève qui s’impliquent, et là, on commence à faire des petits. Au début, on a voulu bâtir de façon plus corporative en trouvant des gens qui nous permettraient d’avoir de l’argent. Maintenant, on va se concentrer aussi sur des campagnes individuelles, où les gens pourront donner des sous. C’était un peu l’idée derrière le lancement du ketchup de Pastene: le goût est un peu différent et c’est pour des gens différents! 

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Patrick Séguin
Patrick Séguin

Dans une précédente entrevue, tu me disais craindre ce qui allait advenir de ton fils quand tu ne serais plus là. As-tu trouvé des solutions?

J’ai 53 ans. Dans 20 ans, il aura 41 ans, et j’en aurai 73. C’est sûr que j’y pense plus. On a fait tout un set-up, Sophie et moi, avec un notaire spécialisé en personnes en situation de handicap vivant dans des familles. Ça lui donne une sécurité et ça nous permet de le protéger. On a bâti un testament pour établir comment ça va fonctionner, où va aller l’argent, etc. Tout ça m’apparaissait comme une montagne au début, puis je me suis rendu compte que, si tu poses des questions et que tu choisis la bonne personne, ça se passe bien. Après ça, quant à savoir plus précisément qui va s’occuper de lui quand je vais mourir ou quand je vais commencer à avoir moins d’énergie... Je ne suis pas encore rendu là. 

Ce sont de grosses questions!

Oui. Et en fait, on vit ça un peu cette année puisque Ginette, une personne qui travaille avec nous depuis 10 ans, a décidé de prendre sa retraite. Écoute, je lui élèverais une statue en avant de chez nous! Ginette est là tous les matins, elle vient chercher Mathis et elle s’en occupe. Son mari a eu un cancer et il est malheureusement décédé il y a trois ans... Mais avant, lui et elle venaient tous les deux et ils s’en occupaient ensemble. On n’est jamais inquiets: on sait qu’elle va rester à la maison jusqu’à 18 h; et, si on arrive avant, évidemment elle quitte, mais on peut se fier à elle. Pour le moment, on cherche la personne qui lui succédera et qui continuera de nous aider. 

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Je n’exagère pas en disant que bien des gens sont heureux que vous soyez heureux tous les deux, Sophie et toi, malgré les difficultés?

On est ensemble depuis 23 ans. Comme tout le monde, on a eu nos moments, nos Waterloo, et on a dû consulter. On n’est pas meilleurs que les autres, mais oui, on est tout le temps ensemble et on s’aime. On a eu des tempêtes et on est passés à travers ensemble; on n’a pas laissé notre relation s’écrouler. En fait, on en est ressortis plus liés qu’avant. Je ne sais pas s’il y a vraiment des couples qui vivent 23 ans ensemble et pour qui ç’a bien été tout le temps... Mais tant mieux pour eux si ç’a été le calme plat! 

Patrick Séguin
Patrick Séguin

Est-ce devenu plus facile avec le temps?

Aujourd’hui, on est passés à travers le pire. Ça fait maintenant 21 ans que Mathis est avec nous, et Sophie et moi, on le sait qu’on est soudés. On est en train de rénover une maison, on est bien.

Il faut avant tout qu’il y ait de l’amour, non?

Oui, tout à fait! Et il y a encore de l’amour dans la maison, c’est clair!

À travers tout ce que tu fais, as-tu du temps pour toi? Avez-vous du temps pour vous retrouver, Sophie et toi?

Oui, Sophie et moi, on prend du temps pour nous. On va souper avec des couples d’amis comme Marie-Claude Barrette et Mario Dumont, dont nous sommes proches. Mais je n’ai pas ma ligue de garage... Je n’en aurais pas le temps! Nicola Merola est mon partenaire chez Pixcom. On est vraiment pareils. On s’est aperçus qu’on a des personnalités très semblables. Nous autres, c’est notre famille et notre job, et on a du fun. Je me réalise beaucoup dans mon travail. Mon loisir, c’est mon travail de v.-p. création. J’ai des amis qui me disent, par exemple, qu’ils prendront leur retraite dans sept ans. Moi, quand je dis à ma blonde que je vais peut-être ralentir, elle me dit: «Me semble, oui!» (rires) Dans mon parcours, j’ai été chanceux d’avoir une job comme la mienne! Et un sentiment de fierté m’habite. Par exemple, quand j’arrive sur le plateau d’Indéfendable, je me souviens que j’ai travaillé là-dessus dans un chalet, puis que j’ai fait un pitch à Pierre Karl pour cette série. Et quand aujourd’hui je vois ce show à la télé, je suis encore comme un enfant: je me dis qu’on l’a fait! Que du monde ait des idées pour écrire un projet, que des gens embarquent là-dedans, que des acteurs jouent les personnages et qu’une fois que c’est diffusé il y ait du monde qui chiale en disant: «C’est-tu écœurant que Léo Macdonald ait trompé sa femme!»... Ça, moi, ça me fascine!

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Si on revient à Mathis... Est-ce que vous constatez une certaine évolution chez lui, des changements intéressants?

Oui, je te dirais qu’il y a une évolution. On le voit à l’école et dans ce qu’il est capable de faire. C’est sûr que Mathis ne pourra jamais tenir une grande conversation. Il est très précis dans des affaires et son divertissement est encore très enfantin. Il écoute encore du Baby Einstein; des films avec du vrai monde, ça ne l’intéresse pas. C’est un fan fini de Pixar. Je te dirais qu’aujourd’hui, c’est difficile d’intégrer de nouvelles affaires, comme un nouveau film. Il aime ça quand c’est prévisible, quand il sait ce qui va arriver. Il va sur YouTube tout seul, il écoute ses affaires. En fait, ce que tous les parents vivent, c’est qu’à un moment donné, ils oublient d’exiger de leur enfant qu’il fasse des choses. On est tellement habitués! Mais, en fait, on réalise qu’il en est capable. Quand je lui dis: «Va chercher ton lunch en bas», il le fait. Alors, oui, il y a une évolution.

Et il travaille?

Quand on parle d’intégration à l’emploi, il faut tenir compte du fait que la diversité de l’autisme est tellement grande! Quand j’entends parler de quelqu’un qui est autiste et qui travaille en comptabilité, par exemple, je peux dire que ce n’est pas ma réalité. Mon gars est plus grand que moi et il est fort, et quand je le vois aller à la Mission Bon Accueil, il prend des caisses et il les lève comme rien. Alors, on est contents parce qu’on a trouvé un travail dans lequel il peut se réaliser. Ce qui est le plus difficile dans notre vie, c’est que depuis qu’il a 19 ans, il a commencé à faire de l’épilepsie. Il a dû passer des examens et prendre des médicaments, et il a fallu trouver la bonne posologie. Et il a eu tous les effets secondaires qu’en principe seulement 10 % des gens ont... Alors, on est là-dedans. C’est plus ça, en fait, mon stress en ce moment. Certains médicaments ont des effets secondaires sur le foie, il faut faire des prises de sang. Et il faut que tu te demandes si tu penses qu’il est capable de vivre avec une crise d’épilepsie aux trois mois ou si tu veux qu’il n’en ait plus du tout. Et à ce moment-là, ça veut dire qu’il doit vivre avec les effets secondaires, comme prendre du poids et vivre un certain déséquilibre. 

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Dans ton travail de v.-p. création, tu supervises combien de productions télé?

Chez Pixcom, cette année, on a produit 22 émissions différentes. Entre autres, Au suivant, Les marieuses, L’hôpital des ados, L’indice McSween, Contre-offre. Et on a fait aussi, entre autres, Indéfendable, Alertes, Anna & Arnaud... Les producteurs sont comme les coachs dans les équipes de hockey. Et moi, mon rôle est d’être le directeur général de l’équipe. J’aide les producteurs.

Tu parlais de retraite, il n’en est pas question non plus pour Sophie...

Non, et en plus, elle va avoir du temps pour jouer, puisqu’elle n’est plus présidente de l’Union. (Sophie Prégent a annoncé en janvier dernier qu’elle quittait la présidence de l’Union des artistes après avoir occupé ce poste durant 10 ans. C’est la comédienne Tania Kontoyanni qui lui succédera.) C’est sûr qu’elle est ma blonde, mais je trouve qu’il y a toujours un hyperréalisme dans son jeu qui est un peu désarmant. 

Est-ce que vous parlez beaucoup de votre travail? Est-ce que tu lui fais des commentaires sur son jeu?

Pas beaucoup. Elle ne se regarde pas: elle tourne, puis elle passe à autre chose. Moi je la regarde. Je vois tous les montages de l’émission. 

Depuis que tu profites de ta tribune pour parler de l’autisme, de la fondation et de ton fils, as-tu constaté que tu touchais les gens et que le monde était plus sensible à la cause?

Chez Costco, par exemple, jamais les gens ne m’arrêtent pour me parler de mon gars: ils me parlent plutôt de quelqu’un ou d’eux qui ont un enfant autiste. Ils ont besoin de partager ce qu’ils vivent. C’est sûr que si je mets une photo de mon fils sur Instagram, il va avoir 3500 j’aime. Et si j’en mets une de moi, je vais en avoir 800. C’est lui maintenant qui retient l’attention. (sourire)

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