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L'article provient de Clin d'oeil
Style de vie

Ces quatre femmes veulent faire la peau au cancer du sein

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Emmanuel Martinez

2021-10-26T13:00:00Z
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Ces quatre femmes veulent faire la peau au cancer du sein. En attendant, elles acceptent de raconter leur histoire en gage de solidarité. Une pour toutes et toutes pour une.

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Sophie Reis  

JULIEN FAUGÈRE
JULIEN FAUGÈRE

L’histoire de Sophie fait croire au destin. De la découverte de son cancer aux questionnements qui en ont découlé, le parcours de cette pétillante pro des communications et fondatrice du site BB Jetlag semble avoir été écrit pour inciter les femmes à rester optimistes, même aux heures les plus sombres.

Comment as-tu découvert ton cancer?

Au mois d’octobre 2020, en pleine pandémie, j’étais en manque d’activités sociales. Je me suis dit: pourquoi ne pas en profiter pour prendre mes rendez-vous médicaux? En sortant de ma visite chez ma gynécologue, alors que j’étais dans le cadre de porte, elle s’est rendu compte qu’elle n’avait pas examiné mes seins. Elle n’a rien trouvé d’anormal, mais m’a tout de même prescrit une mammographie et une échographie. C’est cette dernière qui a révélé ma tumeur, et j’ai subi une mastectomie partielle avant les fêtes.

Tu es en forme malgré la chimiothérapie et la radiothérapie. Qu’est-ce qui t’a aidée?

Le casque réfrigérant que j’utilise pour conserver mes cheveux; car lorsque je me regarde dans le miroir, je ne vois pas quelqu’un de malade. La perception psychologique est énorme. Pour mes enfants notamment. Ma fille, âgée de huit ans à l’époque, avait peur de me voir chauve. Là, je ne me sens pas stigmatisée. Et puis, il y a mon réseau de soutien, une sororité de femmes qui sont passées par là, ainsi que ma famille, mon cercle d’amis proches et mes collègues. Au-delà de ça, si j’ai ressenti très peu d’effets secondaires, c’est vraiment grâce à mon équipe de thérapeutes et de soins paramédicaux (acupuncture, naturopathie, etc.). Je trouve que cette médecine complémentaire devrait cohabiter avec la médecine traditionnelle. Ça m’a aidée à mieux vivre mes traitements.

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Stéphanie Drolet  

JULIEN FAUGÈRE
JULIEN FAUGÈRE

Un cancer du sein métastatique a emporté la maman de Stéphanie lorsque cette dernière avait 21 ans. À partir de ce jour, celle qui a été animatrice radio à Cité Rock Détente a décidé de lutter contre cette forme de cancer encore incurable. En 2018, elle a d’ailleurs créé une fondation pour faire avancer la recherche et aider les femmes à garder espoir.

Raconte-nous ton histoire.

Mon père est décédé d’un cancer du cerveau lorsque j’avais sept ans. À 18 ans, j’ai reçu un coup de fil de ma mère. Elle m’annonçait qu’elle avait le cancer du sein. Elle avait 48 ans. J’étais bouleversée. J’ai raccroché, et la seule chose que je me suis dite, c’est: «Je vais la perdre, elle aussi.» Dans son cas, il y a eu une erreur médicale: elle n’a jamais reçu l’appel censé lui donner le résultat de ses tests. Son cancer a eu le temps de se propager, car le diagnostic de cancer du sein métastatique n’est tombé qu’à son rendez-vous de suivi, un an plus tard. À l’époque, elle ne savait pas combien de temps il lui restait à vivre. Les traitements de radio et de chimio n’ont pas réussi à retarder la progression du cancer. Elle a suivi un traitement expérimental qui a eu des effets secondaires dévastateurs. À 19 ans, je suis devenue son aidante naturelle. Quelques minutes avant de mourir, elle m’a dit qu’elle m’aimait. Je l’ai regardée dans les yeux et je lui ai juré que je poursuivrais notre combat pour toutes celles qui ne veulent qu’une chose: vivre.

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Quel impact cela a-t-il eu sur ta façon de vivre?

Je n’en suis pas guérie. Je reçois plein de témoignages qui me déchirent le cœur chaque fois. Les femmes me disent: «Merci de te battre pour nous sans nous connaître.» Après la mort de ma mère, j’ai commencé à faire des crises de panique et de l’agoraphobie. Pendant deux ans, j’ai vécu l’enfer. Aujourd’hui, je vais bien, j’ai appris à vivre avec mon anxiété. Ma détermination est sans bornes, car cette cause et ma mission sont mes priorités majeures.

Quand as-tu créé ta fondation et quelle est sa mission?

La Fondation Yvon Michel existe depuis 2018 et a pour but de financer des projets de recherche en collaboration avec le CUSM sur le cancer du sein métastatique, incurable pour l’instant. Au-delà de mes raisons personnelles, si je me bats, c’est que seulement 2 % du financement pour la recherche sur le cancer du sein est destiné à celui qui est métastatique. À ce jour, nous avons récolté la somme de 252 533 $. Chaque dollar est versé à la recherche. J’ai fondé et je dirige la fondation avec mon conjoint, qui est d’un soutien extraordinaire. Si elle porte son nom, elle n’est cependant aucunement liée au groupe Yvon Michel. Je l’ai créée en l’honneur de ma mère, pour dire aux femmes de ne pas abandonner, que nous sommes là pour elles.

Avez-vous un message pour nos lectrices?

L’espoir, il faut le garder à tout prix! Je crois en la science. Nos chercheurs travaillent fort pour faire avancer les choses, et je sais qu’ils vont finir par trouver un moyen de contrer la propagation des métastases. J’y crois dur comme fer.

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Lolitta Dandoy  

JULIEN FAUGÈRE
JULIEN FAUGÈRE

Si Lolitta est aujourd’hui un visage connu de la cause du cancer du sein, c’est parce que, depuis sa guérison, cette pro de la mode et maman comblée s’est promis une chose: s’impliquer dès que possible pour redonner un peu de l’espoir qu’elle a reçu grâce au temps que beaucoup de femmes lui ont consacré tout au long de ses traitements.

Quand et comment as-tu découvert ton cancer?

C’était en 2009. Je travaillais au Clin d’oeil. Donc j’étais déjà très sensibilisée à la cause du cancer du sein et j’étais consciente que ça pouvait arriver à quelqu’un de jeune. Un jour, sous la douche, j’ai senti une bosse dure sur mon sein. Je suis allée consulter au CLSC quand j’ai constaté qu’elle ne disparaissait pas, et le médecin m’a examinée. C’est étrange, parce qu’il m’a conseillé de rentrer chez moi et d’oublier ça, ce qui était rassurant en soi. Cependant, ma mère m’a poussée à lui demander une requête pour la clinique du sein. Je ne l’en remercierai jamais assez. Quatre mois plus tard, je n’avais toujours pas de rendez-vous, alors j’ai appelé la clinique. Elle n’avait jamais reçu ma requête! Comme le personnel se sentait mal, on m’a fait passer rapidement. Sauf qu’entre le moment où j’ai remarqué ma bosse et ma consultation, huit mois sont passés. Après examen, j’ai reçu le diagnostic, en mars 2010. J’aurais vraiment pu passer à côté. Le plus important est d’être à l’écoute de son corps.

Au cours de ton traitement, qu’est-ce qui t’a aidée psychologiquement et physiquement?

Le traitement recommandé par le premier médecin était l’opération. Par chance, mon cancer était assez petit pour être opérable. Il y a eu une annulation six jours après mon diagnostic, le 8 mars... J’ai considéré que c’était de bon augure. L’intervention terminée, l’équipe n’était pas satisfaite. J’étais censée n’avoir que de la radiothérapie, mais certains docteurs ont plutôt recommandé la chimiothérapie. J’ai trouvé ça dur. Je devais me marier en septembre 2010, et je savais que j’allais perdre mes cheveux. On a donc annulé le mariage. Ce qui m’a aidée, c’est ma famille et mon chum, qui est mon mari aujourd’hui. Ils ont tous décidé de leur rôle respectif sans que je le sache et se sont relayés. Plus que la douleur physique, le plus difficile a été de composer avec la détresse psychologique. J’avais le sentiment qu’on me cachait quelque chose d’important, que j’allais mourir... À un certain point, je ne changeais même plus de vêtements. Je pense d’ailleurs que c’est ce qui a alerté mon entourage. Une amie m’a parlé des antidépresseurs comme d’une béquille potentielle. Ça m’a convaincue et, surtout, ça m’a vraiment aidée! J’ai même gagné le prix du meilleur blogue en 2011! Par ailleurs, le psychiatre qui m’a suivie était incroyable, il était très humain, très compréhensif.

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Parle-nous de la cause que tu soutiens, le calendrier rose.

De nombreuses femmes m’ont aidée lorsque je suivais mon traitement. Elles ont répondu à des questions que je ne savais pas à qui poser. Je me suis donc promis d’aider à mon tour et de m’impliquer dès que possible. Cette année, c’est un calendrier rose qui a été lancé par Geneviève Patry, la fondatrice d’une boutique appelée Seinplement moi, spécialisée dans les sous-vêtements conçus pour les femmes qui ont subi des opérations. Elle a eu envie de donner la parole aux nombreuses survivantes qu’elle a rencontrées. Elle a organisé une campagne de financement et m’a demandé d’en être la porte-parole. J’ai fait la connaissance de femmes extraordinaires. Leur courage est inspirant. Chaque histoire est tellement différente! Les bénéfices de la vente du calendrier rose sont remis à la Fondation du cancer du sein du Québec.

Infos: seinplementmoi.com

Maude Goyer  

JULIEN FAUGÈRE
JULIEN FAUGÈRE

Cette journaliste et mère de deux enfants est en pleine santé. Dans sa famille, cependant, le cancer du sein a fait des ravages. Ses sœurs et elle ont donc appris à vivre avec cette épée de Damoclès et tentent chaque jour d’apprivoiser l’incontrôlable.

Le cancer du sein occupe une place particulière dans ta famille...

Je suis la plus jeune d’une fratrie de trois filles. À 49 ans, ma mère, Johanne, a eu un premier cancer du sein, qui a été diagnostiqué alors qu’il n’en était qu’au stade 1: un carcinome canalaire infiltrant dans son sein gauche. Elle a eu de la radiothérapie, a été opérée et a perdu une grosse partie de son sein au cours de l’intervention. J’avais 25 ans. Je l’ai vue souffrir, son corps a changé. Ç’a été très difficile; pour elle, bien sûr, et pour notre famille. Dix-huit ans plus tard, en 2017, on lui a diagnostiqué un deuxième cancer du sein. Ce n’était pas un résidu du premier, même si c’était le même type de cancer. Il se situait dans le sein droit, cette fois-ci, et était de stade 2. Elle a subi 16 traitements de chimiothérapie. Il faut savoir que trois des soeurs de ma grand-mère sont mortes du cancer du sein, et six des cousines de ma mère l’ont eu. Il est donc omniprésent dans la vie des femmes de ma famille.

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En quoi consiste ton suivi?

Je suis suivie de très près dans les Cantons-de-l’Est depuis mes 40 ans, ce qui signifie une mammographie ainsi qu’une échographie annuelles. Il en va de même pour mes sœurs, sauf pour celle qui vit au Nouveau-Brunswick, qui doit s’y soumettre tous les deux ans seulement. Personnellement, j’ai beaucoup de kystes dans les seins et des tissus particulièrement denses. Les examens sont minutieux et durent souvent une heure. Et entre chaque suivi, mes sœurs et moi faisons scrupuleusement nos autoexamens.

Comment vis-tu avec ce risque au quotidien?

L’attente des résultats est toujours un stress. Au Canada, en ce moment, les statistiques montrent qu’une femme sur huit aura ce cancer. Dans mon cas, le risque est doublé, il est d’un sur quatre. On est trois sœurs, je vous laisse faire le calcul des probabilités... S’il fallait choisir, je préférerais que ce soit moi. Je ne sais pas, c’est tellement dans un coin de ma tête en permanence que j’ai le sentiment d’y être au moins mentalement préparée, comme si ça faisait désormais partie de moi. Et depuis le deuxième cancer de ma mère, le niveau de stress a augmenté, d’autant plus que j’ai une fille, moi aussi. J’ai toujours été attentive, sensible et à l’écoute de mon corps, et je le suis encore plus avec mon historique familial. Je ne prendrai jamais de risque. Alors oui, c’est comme une ombre qui plane sur mes sœurs et moi. On parle ouvertement de cette peur et de notre rapport à notre corps.

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Qu’est-ce qui te fait le plus peur, justement?

Mourir. Ou perdre un sein, ou les deux. J’ai vu ma mère souffrir à la suite de ses opérations mammaires, et ça m’a bouleversée. L’idée de vivre, ça me fait peur. Et au-delà de tout ça, j’aurais peur de mettre ma vie sur pause, de l’impact que ça aurait sur ma famille. Je l’ai vu et vécu, donc, je sais... Mais je suis vigilante, alerte, et j’ai confiance en la médecine. Par ailleurs, il y a cinq ans, ma mère a subi un test pour savoir si elle était porteuse du fameux gène de transmission, et elle ne l’est pas. Si elle l’était, j’envisagerais très sérieusement la mastectomie préventive. Par contre, ce gène peut éventuellement se développer, elle refera donc le test en 2022, mais pour l’instant, on va toutes bien, et c’est l’essentiel.

À VOIR: Behind the scene de notre numéro Rose, avec Mélanie Maynard et Rosalie Bonenfant   

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