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L'article provient de 24 heures

Ces couples n’ont pas de sexualité et ils sont heureux

Photo courtoisie
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Photo portrait de Sarah-Florence  Benjamin

Sarah-Florence Benjamin

2023-10-13T11:00:00Z
2023-10-13T17:42:24Z
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Ne plus avoir envie de coucher avec son conjoint ou sa conjointe signifie-t-il que son couple est en difficulté? Pas nécessairement. 24 heures a parlé à un couple qui a appris à se passer de sexualité et à deux partenaires pour qui la sexualité n’a jamais fait partie de leur relation.  

«On est déjà comme un vieux couple» − Cam  

Quand Cam et Charlotte ont commencé à sortir ensemble, il y a dix ans et demi, la sexualité était au cœur de leur relation. «On était jeunes, on avait peu d’expérience relationnelle, on se découvrait et on avait les hormones dans le tapis», raconte Cam. 

Mais depuis plusieurs années, ils ne couchent plus ensemble régulièrement. Même que le couple, qui s’est marié il y a un an, n’a toujours pas officiellement consommé son union. 

«Quand Charlotte a commencé l’université, elle était très stressée et épuisée et moi je travaillais de nuit à l’époque. Elle a commencé à avoir un blocage au niveau de la sexualité. Ça a duré trois ans. À l’époque, j’éprouvais beaucoup de frustration par rapport à ça», confie-t-il. 

C’est lorsque le couple a tenté d'avoir des contacts sexuels à nouveau que Cam a commencé à se questionner par rapport à son genre, ce qui a entraîné un nouveau blocage.  

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«Je n’étais plus bien dans ma peau et je ne voulais plus qu’on me touche. J’ai entamé une transition et c’était un gros changement. On a dû revoir toutes nos manières de faire et se questionner sur c’était quoi la sexualité pour nous, et surtout ce qu’on avait besoin dans notre relation.» 

Maintenant, Cam et Charlotte ne manquent pas d’intimité, même sans sexe.  

«On s’aime et on se désire encore. On va se coller tous nus dans notre lit, se faire des massages ou des caresses. Si on ressent un besoin sexuel, on s’occupe de ça nous-même, chacun de notre bord.» 

«Nos amis très proches le savent, mais les autres s’imaginent probablement qu’on couche souvent ensemble, parce qu’on est très tactiles et on est toujours en train de s’envoyer des regards et des sourires», poursuit Cam, qui connaît Charlotte depuis une quinzaine d’années. 

Si aujourd’hui il considère que son couple est aussi solide sans sexualité, c’est parce que sa femme et lui en ont discuté longuement et continuent de communiquer de façon ouverte. Selon lui, la plupart des couples gagneraient à prendre le temps d’en discuter en faisant fi de la pression de la société.  

«C’est normal que la sexualité, autant nos préférences que notre libido, ça change au court d’une vie. Si ça ne cause de détresse à personne, ce n’est pas un problème à régler. Les gens gagneraient à s’informer sur tout l’éventail de possibilités plutôt que de se limiter à une boîte de ce qui est normal.» 

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«Ça ne nous a jamais vraiment intéressés et ça ne risque pas de changer» − Audrey  

Audrey s’est mariée au printemps 2023. Même si elle et son partenaire sont officiellement en couple depuis seulement un an, ils se connaissent depuis 13 ans. Au cours de ces années de vie commune, la sexualité n’a jamais fait partie de leurs besoins. 

«Même quand j’étais ado, je n’ai jamais eu cette phase où on est censée penser au sexe tout le temps. Ça me laisse complètement indifférente et je ne sens pas que c’est nécessaire à mon couple», explique l’étudiante en droit. 

Elle et son partenaire se considèrent comme des personnes asexuelles, une orientation sexuelle qui englobe les gens qui ressentent peu ou pas du tout d’attirance sexuelle.  

Si les deux font chambre à part – surtout en raison des ronflements et de l’allergie aux chats d’Audrey –, ça ne veut pas dire qu’ils n’ont pas de moments d’intimité.  

«Tous les soirs, on passe un moment dans son lit à parler et à se coller, comme les autres couples. C’est juste qu’on n’a pas eu de sexe et que je retourne dormir dans ma chambre après», mentionne-t-elle.   

Ce n’est d’ailleurs pas parce qu’elle et son partenaire n’ont pas de sexualité qu’ils ne sont pas un «vrai» couple.  

«Il y a des aspects de ma personne que je ne montre qu’avec cette personne-là, c’est la seule personne avec qui je fais des câlins et dont j’accepte de sentir les pieds froids sur mes jambes», précise-t-elle.  

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S’il a toujours été clair entre les jeunes mariés qu’ils n’auraient pas de sexualité, ce n’est pas tous leurs proches qui comprennent ce choix.  

«La plupart de mes amis de mon âge le savent et n’ont aucun problème avec ça. Avec les gens de la génération de nos parents, c’est moins simple parce qu’on dirait qu’ils ne comprennent même pas que ça soit possible», raconte Audrey.  

La Montréalaise insiste d’ailleurs: si elle n’a pas de désirs sexuels, ce n’est pas parce qu’elle n’a pas encore rencontré la bonne personne. «Je l’ai trouvée et je l’ai mariée! Ça ne nous a pas donné plus envie de coucher ensemble par exemple», souligne-t-elle.  

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Différencier la sexualité et l’intimité 

Si l’intimité est un ingrédient essentiel à une vie de couple saine, il ne faut pas la restreindre à la sexualité, affirme Mariane Gilbert, directrice administrative chez Les 3 sex* et sexologue. 

«La sexualité est une forme d’intimité, mais il en existe bien d’autres. L’intimité existe dans tous les gestes quotidiens, ne serait-ce que se flatter le dos ou se coller. C’est aussi de passer des moments complices avec la personne au-delà du physique également», explique-t-elle. 

Mariane Gilbert, sexologue
Mariane Gilbert, sexologue Les 3 sex*

Il n’a d’ailleurs rien d’anormal dans le fait qu’un couple cesse d’avoir des relations sexuelles.   

«Déjà, il ne faut pas oublier que près de 1% de la population est asexuelle. Puis, on s’imagine toujours qu’un couple sain doit obligatoirement avoir plusieurs relations sexuelles par semaine, alors que c’est faux. Le désir fluctue pour tout le monde», précise la sexologue.  

Tous les couples gagneraient à discuter de leurs besoins en matière de sexualité, soutient Mariane Gilbert.  

«Tant qu’on communique régulièrement pour s’assurer que tout le monde est à l’aise par rapport à ses besoins et ses limites, c’est sain. Ce genre de discussion peut être difficile. Ça vaut la peine d’être mis à l’agenda suivi d’une activité de couple pour se rappeler qu’on s’aime.» 

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