Cauchemar en cuisine: une loi pour protéger les consommateurs qui manque de mordant
Une nouvelle loi devrait être adoptée pour mieux protéger les consommateurs immobiliers, notamment lors de rénovations, estime une experte

Kathryne Lamontagne et Louis-Philippe Bourdeau
Un cuisiniste montréalais haut de gamme aurait abandonné plusieurs de ses clients après avoir encaissé leurs dizaines de milliers de dollars en acomptes. Plusieurs d’entre eux disent avoir vécu un cauchemar et se sont confiés à notre Bureau d’enquête et à l’émission J.E.
Les mésaventures vécues par des clients de Modena sont la démonstration même que la Loi sur la protection du consommateur manque de mordant en matière de rénovations, estime une experte.
«C’est un peu absurde. On protège mieux le consommateur qui s’achète un nouveau frigo qu’un consommateur qui fait rénover sa cuisine au complet, alors que les sommes ne sont pas du tout les mêmes», constate Marie-Hélène Dufour, professeure en droit des contrats et en droit de la construction à l’Université de Sherbrooke.
À titre d’exemple, il n’existe actuellement aucune limite légale du montant qu’un commerçant peut réclamer en dépôt avant d’entamer ou de terminer les travaux.
«Selon moi, c’est vraiment une lacune de la Loi sur la protection du consommateur [...] Je comprends les clients de dire "on se sent en otage"», poursuit l’experte.
Dans le contrat signé par ses clients, Modena indique que le commerce «n’est pas responsable des délais qu’il ne peut contrôler». Or, cette clause est invalide et interdite par la Loi sur la protection du consommateur, affirme la professeure Dufour.
«On est responsable des fournisseurs, des sous-traitants avec qui on fait affaire. [...] À partir du moment où l’entrepreneur s’est engagé auprès du client, il est tenu de lui livrer le service et d’exécuter les travaux au moment prévu [...] Il reste que les gens qui voient une telle clause dans leur contrat, ça les décourage d’entamer des procédures», avance-t-elle.
Vers une nouvelle loi?
À la lumière de ces constatations, la professeure Dufour estime qu’il est nécessaire d’adopter une nouvelle loi pour mieux protéger le consommateur immobilier. Une telle législation permettrait de mieux encadrer les contrats, les dépôts ainsi que les garanties sur la qualité des travaux, notamment.
L’Office de la protection du consommateur n’a pas souhaité commenter cette initiative.