Canadiens: l'allusion à Alex Kovalev qui fait rêver
Anthony Martineau
Filip Mesar a été sélectionné en première ronde (26e au total) par les Canadiens lors du dernier repêchage de la Ligue nationale de hockey (LNH).
Pourtant, le jeune homme n’est perçu par plusieurs observateurs que comme «l’ami slovaque de Juraj Slafkovsky» ou encore simplement comme «l’autre choix de premier tour du CH.»
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En d’autres mots, Mesar est un peu victime de la popularité de son compatriote Slafkovsky qui, soyons francs, a eu droit à une couverture médiatique absolument déroutante depuis le jour où il a enfilé le chandail du Tricolore en juillet dernier.
L’engouement plutôt restreint envers l’attaquant droitier est donc compréhensible, mais les gens auraient quand même tout intérêt à percevoir sa sélection avec beaucoup d’optimisme.
«J’irais jusqu’à te dire qu’il deviendra l’un des meilleurs patineurs (en termes de vitesse pure) de la LNH», lance avec conviction Frantisek Stolc, le directeur sportif du Poprad HK SKP, une équipe de la meilleure ligue slovaque où a évolué Mesar ces deux dernières saisons.
Un recruteur d’expérience oeuvrant pour le CH en rajoute.
«Filip n’est pas Alexei Kovalev, mais à l’époque, les gens payaient pour voir le no 27 à l’entraînement tellement il était spectaculaire. Mesar est dans cette catégorie.»
Analyse d’un espoir au potentiel largement sous-estimé.
Bon depuis longtemps
Filip Mesar a donc évolué, comme on le disait, au sein du club senior du Poprad HK SKP ces deux dernières années. Mais il est débarqué au sein de l’organisation il y a déjà six ans. Et son talent est reconnu en Slovaquie depuis encore plus longtemps.
«Après de brèves escales en Norvège et en Autriche, je suis revenu en Slovaquie en 2016 pour travailler avec le Poprad HK SKP, raconte Stolc, qui possède également une vaste expérience à titre d’entraîneur. Cette année-là, on parlait déjà de Filip comme d’un enfant extrêmement talentueux. Il n’avait que 11 ans à cette époque, mais son nom résonnait un peu partout dans le monde du hockey slovaque. J’étais très excité de savoir que j’allais pouvoir travailler avec lui.»
Promu au sein de l’équipe première dès l’âge de 15 ans et confronté à des hommes, Mesar a rapidement dû adapter son jeu sur la patinoire.
«Tout le monde sait que Filip n’a pas le plus gros des gabarits», poursuit le directeur sportif.
«Dès le départ, nous lui avons dit que s’il voulait atteindre la Ligue nationale malgré sa stature un peu plus frêle que la norme, il se devait d’être extrêmement rapide. Il a donc choisi de s’entraîner très dur, non seulement pour être explosif sur ses patins, mais aussi pour être en mesure de prendre des décisions tout aussi rapidement.
«Aujourd’hui, il est un patineur des plus solides. Il est rapide, agile et puissant. Et la beauté de la chose, avec Filip, c’est qu’il conserve cette fantastique vitesse lorsqu’il a la rondelle. Il peut aussi sortir du coin aussi rapidement qu’il y est arrivé. Bien malin est celui qui peut le prendre à contre-pied!»
Ces dernières paroles de Stolc sont rapidement corroborées par l’expérimenté dépisteur du Tricolore approché dans le cadre de cet article. L’homme, qui en a pourtant vu d’autres, n’hésite pas à se montrer très élogieux envers son nouvel espoir.
«Je l’adore, honnêtement. Il peut compétitionner de plusieurs façons. Son jeu est basé sur la vitesse et les habiletés. Il joue constamment à un tempo très rapide. Il est très difficile à attraper sur la patinoire et il peut réaliser d’impressionnantes manœuvres en patinant. Il est très excitant à voir jouer.»
«Quand un ancien patineur de la LNH souhaite jouer avec toi...»
À quel point Filip Mesar était-il performant contre des hommes lors de ses deux dernières saisons en Slovaquie?
Une anecdote racontée par Frantisek Stolc est particulièrement révélatrice.
«En 2020-2021, Filip en était à sa première saison avec notre équipe senior. Il avait 15 ans. Cette année-là, Brandon Mashinter, un gars qui a joué une soixantaine de matchs dans la LNH et été capitaine dans la LAH, évoluait aussi pour notre club. À un moment donné, Brandon est allé voir l’entraîneur et lui a demandé de le jumeler à Filip.
«Écoute, quand un ancien joueur de la LNH souhaite jouer avec toi malgré tes 15 ans et qu’il va lui-même voir l’entraîneur pour le lui dire, ça en dit long sur le respect qu’il te porte.»
Mashinter lui-même a tenu à commenter l’histoire.
«L’entraîneur m’a écouté! Dès le moment où j’ai été jumelé à Filip, nous avons fait des dégâts. Il savait constamment me trouver sur la patinoire. C’est un joueur tellement intelligent. Il possède un sens de l’anticipation qui le rend très dangereux. Il est rapide et sait aussi créer de dangereuses séquences par lui-même.»
Quel impact dans la LNH?
Pour Frantisek Stolc, il ne fait aucun doute que Mesar aura une belle et longue carrière dans la LNH. Il ose d'ailleurs une projection très audacieuse, mais Ô combien excitante à son sujet.
«À mon avis, il deviendra un très bon joueur, car le hockey de la LNH est de plus en plus axé sur la vitesse et cet aspect constitue la plus grande force de Filip. J’irais même jusqu’à te dire qu’il deviendra l’un des meilleurs patineurs de la LNH.
«Selon moi, il a ce qu’il faut pour s’établir sur l’un des deux premiers trios des Canadiens dans le futur. Il possède d’excellentes habiletés offensives et il a toujours su s’adapter au calibre de jeu qu’on lui proposait. Je n’ai personnellement jamais vu Filip être écrasé par un nouveau défi. Bien au contraire.»
Même son de cloche chez Brandon Mashinter.
«Il aura un futur brillant dans la LNH. Il a le talent et l’éthique de travail pour arriver à ses fins.»
Le recruteur du CH démontre également une très belle confiance envers le potentiel offensif de Mesar. La déclaration suivante parle d’elle-même.
«Mesar et Slafkovsky ont plein de belles qualités, mais le motif principal et incontesté derrière leur sélection est la production qu'on croit qu'ils pourront avoir dans la LNH».
Autre aspect très intéressant dans le cas du jeune slovaque : sa polyvalence. Semble-t-il, confie son ancien directeur sportif, qu’il peut jouer au centre comme à l’aile.
«Il a joué tout son hockey mineur et son hockey junior à la position de centre. Mais à son arrivée au sein de l’équipe senior, nous l’avons muté à l’aile pour qu’il apprenne également à se débrouiller à cette position. Au départ, il avait toujours tendance à se comporter comme un pivot, mais il a vraiment appris à être efficace comme ailier, donc il peut maintenant jouer aux deux endroits. Son prochain entraîneur aura le luxe de choisir!»
Du Alex Kovalev dans le nez
L’auteur de ces lignes s’apprête à mettre fin à la discussion téléphonique avec le recruteur de la Sainte-Flanelle, lorsque celui-ci l’interrompt.
«Attends une minute! J’ai une petite info intéressante à te donner. Si tu as l’occasion de te déplacer aux matchs, porte attention à ce que fait Filip dans les séances d’échauffement (warm-up). Il réalise des choses incroyables! Il est constamment en train de faire des trucs pas possibles avec la rondelle. En fait, chaque séance devient carrément pour lui une pratique d’habiletés individuelles.
Visiblement inspiré, l’employé du CH poursuit.
«Tout le monde se prépare à un match différemment, mais si tu regardes les meilleurs joueurs de la LNH comme Sidney Crosby, il se sert de chaque "warm-up" pour tenter des choses magiques qu’il reproduit ensuite lors des matchs. Et c’est exactement le moment de pratiquer ce genre de manœuvres!
«Filip n’est pas Alexei Kovalev, mais à l’époque, les gens payaient pour voir le no 27 à l’entraînement tellement il était spectaculaire. Mesar est dans cette catégorie. Il est un joueur spectaculaire qui ne lésine pas sur les efforts pour que ses feintes et gestes gracieux soient au plus haut niveau possible.»
Non, Filip Mesar n’est pas Alex Kovalev. Il en est même très loin à l'heure actuelle. Mais si l’on se fie aux commentaires des gens l’ayant côtoyé de près pendant plusieurs années, il pourrait lui aussi, avec la bonne approche et à l'image du Russe, faire sourire les partisans du Tricolore pour très longtemps.