Canada 2100: Ottawa défend son plan malgré les inquiétudes québécoises
![](/_next/image?url=https%3A%2F%2Fm1.quebecormedia.com%2Femp%2Femp%2F0902218e906afadf208a2f7a-468c-49e7-9c04-3f0eef7cd9c1_ORIGINAL.jpg&w=3840&q=75)
Gabriel Côté et Raphaël Pirro
Ottawa assure qu’il est possible d’accueillir 500 000 nouveaux résidents par année tout en protégeant le poids démographique des francophones au Canada, malgré les inquiétudes partagées par tous les partis à l’Assemblée nationale.
• À lire aussi: 100 millions en 2100: «Les immigrants vont tuer le Québec»
• À lire aussi: Immigration massive: impossible de débattre sans se faire insulter
• À lire aussi: Le Québec affaibli dans un Canada de 100 millions
Le Bloc Québécois s’est chargé d’en partager quelques-unes lors de la période de questions lundi.
«Pourquoi les milieux économiques auraient le premier mot, le dernier mot pis finalement le seul mot à dire là-dedans?» a demandé le bloquiste Alexis Brunelle-Duceppe.
L’idée d’atteindre un pays de 100 millions d’habitants d’ici 2100 vient de l’Initiative du siècle, un groupe de pression largement issu du monde économique et financier canadien.
Le plan du gouvernement fédéral dévoilé par le ministre Sean Fraser à l’automne s’inscrit dans cette droite ligne, mais sans faire référence à l’Initiative du siècle.
Pour le ministre Fraser, «[...] continuer d’augmenter le nombre [d’immigrants] pour soutenir notre économie, c’est une bonne chose pour le Canada, c’est une bonne chose pour le Québec».
«De l’aveu même de ses créateurs, cette Initiative ne tient pas compte de l’avenir du français, du poids politique du Québec ou des Premières Nations: c’est strictement économique», a commenté la whip du Bloc, Claude DeBellefeuille.
Le conservateur Pierre Paul-Hus remarque que le gouvernement «manque de respect envers les immigrants actuels, ceux qui sont déjà là», en raison d’un système qui déborde.
«On doit respecter la capacité d’accueil des provinces. On a actuellement un problème de logement au Canada, c’est criant pour la population qui est déjà en place. Comment on peut se permettre de bien accueillir de nouveaux citoyens quand on n’est pas capables de s’occuper d’eux de façon adéquate?» a-t-il dit.
- Écoutez le segment LCN avec Richard et Jean-François Guérin via QUB radio :
Inquiétudes à Québec
À Québec, les partis d’opposition ont manifesté de l’inquiétude face au projet du gouvernement fédéral, car il met potentiellement en péril l’avenir de la langue française et de la nation québécoise.
«C’est très préoccupant, a lancé le chef intérimaire du Parti libéral du Québec, Marc Tanguay. Une telle initiative aurait un effet excessivement perturbant, notamment sur l’aspect linguistique. Il faut garder aussi le poids politique du Québec.»
S’il reconnaît des «divergences d’opinions» à l’Assemblée nationale sur la question des seuils d’immigration, Marc Tanguay estime néanmoins que c’est au Québec de trancher. «Une fois qu’on a fait ça, le fédéral doit en tenir compte, c’est impératif. Il ne peut pas aller au-delà de ça», a-t-il expliqué.
Quant au Parti Québécois, il considère que l’Initiative du siècle est un «projet absolument lunaire» et antidémocratique. «Il y a absence de débat démocratique, et les Québécois sont encore une fois dépossédés de leur droit de décider par eux-mêmes en fonction de leur spécificité et de leur volonté», s’est indigné le chef péquiste Paul St-Pierre Plamondon.
«C’est une raison supplémentaire de faire l’indépendance du Québec», a ajouté son collègue Pascal Bérubé.
Le député solidaire Guillaume Cliche-Rivard a pour sa part souligné un «inconfort» avec les seuils d’immigration proposés par le fédéral, qui dépassent selon lui la capacité d’accueil du Québec. «Si le Québec était en plein pouvoir de son immigration, on n’aurait pas ce débat-là», a-t-il affirmé.
L’ex-avocat spécialisé en immigration est d’avis qu’il revient au Québec de déterminer par lui-même sa capacité d’intégration, mais plaide pour que cela se fasse après avoir consulté les experts et la population, et en prenant en compte le phénomène de l’immigration temporaire.
Ils et elles ont dit:
«Le Québec n’a pas été consulté sur cette orientation politique majeure. Ça va changer le visage du Canada, cette orientation-là.» – Christine Fréchette, ministre de l'Immigration
«Les politiques d’immigration, ce n’est pas un concours de vertu, c’est des choix publics avec des impacts réels, qui devraient être démocratiques.» – Alexis Brunelle-Duceppe, Bloc
«Moi, ce qui m’importe, c’est qu’on soit accueillants pis qu’on ait les moyens pour bien intégrer les gens. [...] Est-ce qu’on a les moyens de faire en sorte que ces gens-là vont avoir une bonne vie et [vont] bien s’intégrer dans la société québécoise? Moi c’est ça qui m’importe.» – Alexandre Boulerice, NPD