C Series : le monumental flop aérien du Québec
Michel Girard
Tel que le rapportait hier mon collègue Jean-Michel Genois Gagnon, notre investissement de 1,3 milliard de dollars dans le sauvetage de la C Series de Bombardier ne vaut finalement plus une cenne.
Effectué par l’entremise du Fonds de développement économique (FDE), cet investissement du gouvernement de Philippe Couillard a finalement fondu comme neige au soleil. « La juste valeur du placement est nulle », déclare-t-on dans les états financiers du FDE au 31 mars 2021.
À QUI LA FAUTE ?
Que le gouvernement Couillard injecte de l’argent dans la survie de la C Series, cela s’avérait défendable à l’époque puisque Bombardier risquait la faillite.
Mais Philippe Couillard et son ministre de l’économie de l’époque, Jacques Daoust, ont été mal conseillés. Au lieu d’injecter des fonds publics dans la C Series, il aurait été nettement mieux avisé et plus sécuritaire d’investir le même argent dans le capital-actions de Bombardier.
Si tel avait été le cas, voici où en serait rendu notre placement de 1,3 milliard $ dans la C Series.
Lorsque l’investissement de 1,3 milliard $ du gouvernement Couillard dans le sauvetage de la C Series de Bombardier a été annoncé le 29 octobre 2015, l’action de Bombardier se négociait à 1,49 $.
Aujourd’hui, l’action de Bombardier s’échange autour de 2,18 $. En hausse de 46 %.
Ainsi, si le gouvernement Couillard avait investi dans la compagnie Bombardier au lieu d’investir uniquement dans la C Series, son investissement de 1,3 milliard $ vaudrait aujourd’hui 1,9 milliard $, soit 600 millions $ de plus.
AUTRE GAFFE GOUVERNEMENTALE
L’investissement de 1,3 milliard $ dans la C Series a également fait l’objet d’une autre gaffe de la part de l’ancien gouvernement libéral de Philippe Couillard.
Lors de la signature du protocole d’entente sur l’investissement de 1,3 milliard $ de Québec dans la C Series, le 29 octobre 2015, il était prévu que le gouvernement se fasse octroyer 200 millions de bons de souscription, à un prix d’exercice de 2,21 $.
Ce prix d’exercice renfermait ainsi une prime de 48 % par rapport au cours de l’action de Bombardier.
Pire encore. Lors de la signature de la convention de souscription, le 22 juin 2016, le gouvernement Couillard acceptait de se faire couper de moitié le nombre de bons de souscription obtenu initialement.
Finalement, Québec ne détenait plus que 100 millions de bons de souscription au lieu de 200 millions.
L’OCCASION RATÉE
Qu’à cela ne tienne, entre le 18 septembre 2017 et le 16 juillet 2018, le titre de Bombardier avait enregistré une hausse magistrale, passant de 2,20 $ à 5,41 $.
Québec aurait pu profiter de cette « fenêtre » pour exercer ses bons de souscription et ainsi encaisser quelques centaines de millions de dollars de profits avec ses bons de souscription.
Mais il ne l’a pas fait ! Après cette courte période florissante, le titre de Bombardier a replanté de nouveau, tombant même à un plancher de 33 cents le 16 octobre 2020.
De ce temps-ci, l’action est revenue tester la barre des 2,21 $. Le titre est vraiment sur une belle lancée depuis que Bombardier se concentre uniquement sur le secteur des avions d’affaires.
Le problème avec le bloc de 100 millions de bons de souscription ? Québec ne le détient plus. Les bons de souscription ont été annulés, leur durée de vie de cinq années ayant pris fin le 1er septembre dernier !
SOUS AIRBUS
Comme on sait, Québec détient encore 25 % de la C Series, rebaptisée A220 sous la férule d’Airbus, son nouveau propriétaire.
Même s’il attribue actuellement à cette participation dans l’A220 une « valeur nulle », il se pourrait que Québec puisse récupérer une « parcelle » de son investissement initial de 1,3 milliard $ lors du rachat de ses 25 % par Airbus, le 1er janvier 2026.
Chose certaine, la multinationale Airbus, elle, a fait un sacré bon coup en mettant le grappin sur la C Series, un super avion que Bombardier a développé au coût de 7 milliards $ US.