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C'est quoi le problème de l'arsenic à Rouyn-Noranda?

PHOTO D'ARCHIVES, Agence QMI
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Photo portrait de Guillaume Cyr

Guillaume Cyr

2022-07-06T03:42:33Z
2022-07-12T13:05:16Z
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À Rouyn-Noranda, où la Fonderie Horne est pointée du doigt en raison de ses émissions de polluants, notamment d'arsenic, la population est plus à risque de développer un cancer du poumon que dans le reste du Québec. Que se passe-t-il dans cette ville de l'Abitibi-Témiscamingue? C'est quoi, au juste, l'arsenic? On répond à vos questions.

• À lire aussi: 4 choses à savoir sur Glencore, la multinationale derrière l'usine de Rouyn-Noranda

C’est quoi l’arsenic? 

C’est un élément chimique qui peut circuler dans l’air via de fines particules et ainsi rentrer dans les poumons. On retrouve des rejets d’arsenic dans l’air provenant de certains types de mines, de fonderies ou d’usines de fabrication, explique la Société canadienne du cancer.  

Pourquoi c’est dangereux pour la santé? 

C’est un cancérigène reconnu. Son exposition à très long terme peut provoquer un risque accru de cancer ou nuire au développement de l’enfant, indique la Dre Clodel Naud-Bellavance, médecin de famille à Rouyn-Noranda. 

L’arsenic est «cancérigène» dès qu’il est présent dans l’air, explique la Dre Naud-Bellavance. «Déjà là, on en voudrait le moins possible» pour assurer une meilleure qualité de l’air, renchérit-elle. 

La médecin souligne que ce produit chimique a un impact sur le développement neurologique des enfants dès qu’on dépasse les 15 nanogrammes par mètre cube.  

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Pourquoi la concentration dans l’air est plus élevée à Rouyn-Noranda? 

Dans cette ville de l’Abitibi-Témiscamingue, la Fonderie Horne, qui produit du cuivre depuis 1927, est autorisée à générer 100 nanogrammes par mètre cube (ng/m3) d’arsenic, alors que la limite pour le reste de la province est de 3 ng/m3. Il s’agit d’une sorte de droit acquis. 

La moyenne enregistrée y est de 87 ng/m3. «Et c’est une moyenne. Certaines journées, ça peut atteindre 400, voire plus. Dans l’histoire de Rouyn, on a déjà mesuré 1 000 nanogrammes dans une journée», affirme la Dre Naud-Bellavance. 

«On ne sera jamais capable de dire quand on voit un patient que c’est à cause de la fonderie, mais quand on prend du recul et qu’on voit les chiffres globaux, on voit l’impact de l’arsenic sur la population», spécifie-t-elle. 

Pourquoi on en parle maintenant? 

La semaine dernière, l’Institut national de la santé publique du Québec (INSPQ) a publié un rapport sur la situation à Rouyn-Noranda. Si le statu quo persiste, il pourrait y avoir de 13 à 554 cas supplémentaires de cancer du poumon par million d’habitants. Des chiffres qui baisseraient à 6,7 et 288 cas supplémentaires si les émissions dans la ville étaient baissées aux normes québécoises.

Le calcul de l’INSP repose sur un scénario d’exposition 24 heures par jour, sept jours semaines, pendant 70 ans.

«On dépasse largement les risques normalement acceptables et qu’on souhaite éviter quand on est exposé à de tels contaminants. Ce n’est pas parce que ces chiffres représentent des risques plus petits en termes de nombre qu’il faut esquiver l’enjeu que ça représente», a expliqué le Dr Luc Boileau, directeur national de santé publique.

Le mois dernier, Radio-Canada dévoilait que l’ex-directeur national de la santé publique, le Dr Horacio Arruda, avait fait retirer des données récentes sur l’état de santé des citoyens de la ville, qui devaient figurer dans un rapport de biosurveillance, en 2019. 

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«Ça nous a choqués et ébranlés de voir les données entre Rouyn-Noranda et partout au Québec. C’est ce qui a ramené le sujet à l’avant-plan», indique la Dre Naud-Bellavance.  

La médecin, qui a grandi à Rouyn et y pratique depuis cinq ans, ajoute que le sujet de l’impact de l’arsenic dans l’air sur la santé est toutefois discuté par les résidents de la place depuis un bon moment. «Richard Desjardins [le chanteur] en a même parlé dans un film en 1984», souligne-t-elle, faisant référence au documentaire Noranda qui fait état de cette problématique. 

Le Dr Arruda s’est défendu en plaidant qu’il n’avait jamais voulu cacher ces informations, mais qu’il attendait plutôt les résultats d’une étude plus approfondie menée par l’Institut national de santé publique (INSPQ). 

Des professionnels préoccupés

La semaine dernière, une cinquantaine de médecins de l’Abitibi-Témiscamingue ont interpellé le gouvernement dans une lettre cosignée réclamant que les émissions d’arsenic de la Fonderie Horne respectent les normes imposées partout ailleurs au Québec.  

L’Ordre des chimistes du Québec (OCQ) a pour sa part fait valoir, dans un communiqué, que Glencore, propriétaire de la fonderie, et le gouvernement ont des comptes à rendre à la population. Celle-ci devrait connaître les mesures mises en place pour protéger le public, jugent-ils. 

La semaine dernière, le premier ministre du Québec, François Legault, a affirmé qu’il n’exclut pas de carrément fermer la fonderie si elle ne présente pas un plan pour réduire les émissions à un niveau sécuritaire pour la population. 

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