Brett Stapley rêve à une offre des Canadiens

Nicolas Cloutier
Parmi les espoirs dignes d’intérêt chez les Canadiens de Montréal, il n’y a pas que Jordan Harris qui devra s’entendre avec l’équipe d’ici le 16 août. Il faudra également surveiller le dossier de Brett Stapley qui, sans tambour ni trompette, connaît une éclosion tardive dans la NCAA cette saison.
La situation de Stapley est sensiblement différente de celle de Harris. Si ce dernier décide de se prévaloir de son autonomie, beaucoup d’équipes seront dans le derby pour ses services sachant qu’on le considère comme l’un des meilleurs défenseurs du circuit collégial.
Or, Stapley est un joueur plus énigmatique, un choix de septième tour en 2018 qui commence tout juste, à l’âge de 22 ans, à marquer des buts avec régularité contre des adultes. Les Canadiens ont déjà beaucoup d’espoirs et ils ont 12 choix en vue de l’encan amateur de 2022. Puisqu’une limite de 50 contrats est permise par équipe, la décision de soumettre une offre à Stapley n’est pas aussi évidente qu’il n’y paraît.
Le CH n’a pas le gros bout du bâton dans les négociations avec Jordan Harris, mais ça semble être le contraire pour ce qui est de Stapley.
«Ce serait évidemment un rêve de recevoir une offre des Canadiens, a avoué le créatif joueur de centre de l’Université de Denver lors d’un entretien téléphonique avec le TVASports.ca. C’est difficile de ne pas y penser, mais en ce moment, je dois essayer de gagner un autre championnat ici.»
Si on lit entre les lignes, Stapley ne devrait pas hésiter longtemps si le Tricolore lui offre un contrat d’entrée de trois ans – qui représenterait une jolie somme pour tout jeune adulte.
Un attaquant dynamique
Le profil de Stapley est intéressant. Le joueur de centre droitier fait preuve de beaucoup de créativité sur la patinoire. Il aime tendre des pièges à l’adversaire et ses patrons de jeu sont difficiles à lire pour les défenseurs.
«C'est un joueur très cérébral, a noté son entraîneur-chef à l'Université de Denver, David Carle. Il est plus rapide qu'il en a l'air et il est bon sur les extrémités de ses lames (edges). Avec la rondelle, il peut faire perdre l'équilibre aux joueurs adverses et les faire mal paraître. Quand il bouge ses pieds, il est assez dynamique en zone offensive et dans les phases de transition.»
Stapley n’est également plus aussi chétif qu’au moment où les Canadiens ont jeté leur dévolu sur lui. Le jeune homme est passé de 5 pi 10 po à 5 pi 11 po et de 173 lb à 190 lb.
«Sa progression est belle, il devient complet, a corroboré Carle. Il joue avec plus de rythme qu'avant et il gagne davantage de batailles pour la rondelle. Nous sommes satisfaits de ce qu'il a accompli jusqu'ici cette année.»
Bref, le jeune homme rapproche petit à petit son jeu du standard exigé chez les professionnels, lui qui devrait logiquement faire le saut dans la Ligue américaine l’an prochain.
Stapley collectionne les mentions d’aide depuis un bout de temps, mais il a ajouté une corde à son arc. Son record personnel en une saison dans la NCAA n’était que de cinq buts et il en compte déjà 12 en 2021-2022. Celui qu’il a marqué contre l’Université d’Alaska Fairbanks est sans doute l’un des plus beaux réussi en NCAA cette année.
«Ma saison morte a été plus longue à cause d’une vilaine blessure à une épaule la saison passée qui a nécessité une opération, a expliqué Stapley. J’ai pu passer plus de temps à Denver. Je me suis assuré d’améliorer mon tir. Les rondelles trouvent le fond du filet cette année.»
Satanées épaules
Stapley pourrait vous parler longtemps des blessures aux épaules. Ses ennuis avec celles-ci remontent à sa dernière saison dans le junior A dans la Ligue de la Colombie-Britannique (BCHL), avec les Vipers de Vernon.
«J’ai subi une déchirure du labrum de mon épaule gauche il y a quelques années, a raconté le jeune attaquant. J’ai pu m’en sortir avec de la physiothérapie et en portant une épaulière durant ma première année dans la NCAA et le Frozen Four. Je suis ensuite passé sous le bistouri pendant la saison morte [en 2019].»
Mais la saison dernière, c’est sur son épaule droite que la malchance s’est acharnée.
«C’était presque complètement déchiré, a décrit Stapley. Si on imagine une horloge, le docteur a dit que c’était déchiré de 12h jusqu’à 9h. Des tâches de base dans la vie de tous les jours comme ouvrir la porte du frigidaire, dormir ou même tousser devenaient pénibles. Je n’ai eu aucune autre option que de me faire opérer. Maintenant, je me sens très bien. Je suis à 100%.»
Jouer contre Nick Suzuki
Comme pour bien des joueurs de hockey, l’ascension de Brett Stapley jusqu’à un niveau très compétitif est le résultat de multiples sacrifices de ses parents.
«C’est devenu sérieux quand jouer au hockey le printemps est entré dans l’équation, a-t-il mentionné. J’aimais les autres sports, mais c’est le hockey qui me passionnait par-dessus tout.»
Pour que leur progéniture puisse continuer à pratiquer son sport fétiche au terme de la saison hivernale, les parents de Stapley, qui demeuraient alors à Campbell River en Colombie-Britannique, faisaient chaque fin de semaine une heure et demie de route pour ensuite prendre le bateau afin de rejoindre l’île de Vancouver.
«Ce faisant, je pouvais m’entraîner avec l’équipe qui allait participer au populaire tournoi Brick. On a fini par se lier d’amitié avec les familles là-bas, si bien qu’on a déménagé au nord de Vancouver pour quelques années. J’ai joué avec le club du North Shore pendant l’hiver puis il y a eu le repêchage bantam de la WHL.
«Je me souviens d’avoir joué contre Nick Suzuki quand j’étais jeune. J’avais probablement 10 ou 11 ans. Je vous confirme qu’il a toujours été bon! (rires). Je l’ai aussi affronté aux Jeux d’hiver quand il était dans la puissante délégation ontarienne. Ses équipes étaient toujours très fortes.»
Un plan B
Même s’il ne s’agit pas de l’avenue la plus populaire pour le futur joueur de la Ligue nationale de hockey, plusieurs Britanno-Colombiens connaissent du succès en jouant dans la BCHL pour ensuite parfaire leur développement dans le circuit universitaire aux États-Unis.
Stapley aurait pu évoluer dans la WHL, lui qui a été repêché par les Hitmen de Calgary en 2014. Il aurait possiblement bénéficié de plus de visibilité là-bas s’il avait empilé les points. Or, il ne regrette pas son choix.
«J’avais vu à quoi ressemblait le hockey du circuit universitaire avant, et j’ai été témoin de joueurs avant moi qui étaient passés par le junior A et qui ont eu du succès par la suite dans ces universités très cool, avec plusieurs partisans et du soutien aux étudiants. Le portrait dans son ensemble avait l’air très bien.»
Qui plus est, Stapley pourra rapidement retomber sur ses deux pattes si son rêve de gagner sa vie en jouant au hockey professionnel ne se concrétise pas.
«J’étudie en développement de propriété dans l’école de profession immobilière. Être un agent immobilier est le plan B. Évidemment, je veux continuer à jouer au hockey, c’est mon rêve, mais je me suis toujours fait dire par mes parents que tu devais trouver quelque chose sur lequel te rabattre. C’est l’avantage d’aller à l’université. Ma famille travaille depuis des générations dans le secteur de l’immobilier.»
S’il ne revêt pas un jour l’uniforme des Canadiens, on pourrait quand même voir le visage de Stapley sur une pancarte. Et qui sait s'il ne vous aidera pas à trouver la demeure de vos rêves.