Bay du Nord: poursuite contre le gouvernement fédéral
Élizabeth Ménard
Une poursuite contre le ministre de l’Environnement et du Changement climatique a été déposée en Cour fédérale le 6 mai par l’organisme Ecojustice qui conteste la décision du gouvernement d’approuver le projet Bay du Nord, une plateforme pétrolière au large de Terre-Neuve qui compte extraire jusqu’à 1 milliard de barils de pétrole.
• À lire aussi: Jusqu’à 1 milliard de barils de pétrole extraits près de Terre-Neuve: Ottawa approuve Bay du Nord
• À lire aussi: Le pétrole du projet Bay du Nord sera-t-il vraiment «propre»?
Ecojustice agit au nom d’Équiterre et de la Fondation Sierra Club, deux organismes environnementaux qui affirment que le projet Bay du Nord va à l’encontre des obligations internationales du Canada.
« Ce projet représente une menace pour nos écosystèmes marins et nos objectifs de réduction des émissions de GES. Considérant tous les impacts à long terme, nous n'avons d'autre choix que de faire cette demande de contrôle judiciaire auprès de la Cour fédérale », a expliqué la directrice générale d’Équiterre, Coleen Thorpe.
Bay du Nord est un projet de 6,8 milliards $ qui prévoit la construction d’une nouvelle plateforme de forage à 500 km à l’est de Terre-Neuve par la compagnie norvégienne Equinor. On vise à y extraire de 300 millions à 1 milliard de barils de pétrole sur 30 ans, à compter de 2028.
Après un rapport alarmant du GIEC
Le ministre fédéral de l’Environnement et du Changement climatique, Steven Guilbeault, a donné son aval au projet le 6 avril dernier. Cette décision est survenue deux jours après après la publication d’un rapport catastrophique du Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC) qui concluait que les gouvernements doivent cesser de subventionner les nouveaux projets de combustibles fossiles pour éviter les pires impacts des changements climatiques.
«Investir dans de nouvelles infrastructures de combustibles fossiles est une folie morale et économique», avait lancé le secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, dans son discours d’ouverture.
Les plaignants arguent que le ministre n’a pas pris compte, dans son évaluation, des émissions de gaz à effet de serre émis lors de la combustion du pétrole.
« La rhétorique de l'industrie et des gouvernements selon laquelle on saurait produire du ‘pétrole propre’ omet que le processus d'extraction du pétrole ne représente que 10 % des émissions d'un projet pétrolier. En fait, les 90 % restants proviennent de la combustion du pétrole », font-ils valoir dans un communiqué.
• À lire aussi: Du pétrole, ça reste du pétrole: ramenons nos politiciens à la raison
Ils affirment que Bay du Nord sera responsable de près de 400 millions de tonnes de carbone, soit l’équivalent des émissions de 7 à 10 millions de voitures.
Un atout économique
Le premier ministre de Terre-Neuve-et-Labrador, Andrew Furrey, et la vice-première ministre du Canada Chrystia Freeland ont défendu le projet, arguant qu’il s’agit d’un atout économique primordial pour la région, la plus endettée du pays.
« Nous savons qu'il existe des voies meilleures et plus sûres pour les travailleur.ses du secteur des combustibles fossiles afin qu'ils puissent participer aux opportunités croissantes dans les secteurs de l'éolien, du solaire et de l'efficacité énergétique », répond la directrice nationale des programmes de la Fondation Sierra Club Canada, Gretchen Fitzgerald.