La guerre en Ukraine en direct sur les réseaux sociaux: attention aux fausses nouvelles
Jean-Michel Clermont-Goulet
L’invasion de l’Ukraine par la Russie est peut-être la première guerre à se dérouler en direct sur les réseaux sociaux. Depuis la déclaration de guerre du président russe Vladimir Poutine, les réseaux sociaux ont été pris d’assaut par des images et des vidéos du conflit. Mais attention: ce n’est pas parce que c’est sur TikTok, Instagram ou Facebook que c’est vrai.
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«Avant, [l’arrivée de] la télé a emmené la guerre dans notre salon. Maintenant, les réseaux sociaux emmènent ça dans nos poches, directement entre nos mains», affirme Jean-Hugues Roy, professeur à l’École des médias de l’UQAM.
Mais si les médias sociaux nous donnent un accès inédit aux combats en sol ukrainien, ils déroulent aussi le tapis rouge à la désinformation. Et c'est notre responsabilité de nous assurer que l'information qu'on partage est véridique.
«C’est à nous de vérifier l’info. Si on partage une fausse nouvelle, c’est un peu notre faute. Il faut faire attention et se tourner les pouces sept fois avant de peser sur send», insiste-t-il.
«C’est bien beau faire nos recherches, encore faut-il le faire adéquatement et ne pas se fier à nos préjugés, poursuit-il. Il faut quasiment douter de soi-même, remettre en question nos a priori et faire attention au biais de confirmation.»
Malgré la prolifération des fakes news et de la désinformation sur le web, il voit d'ailleurs la montée en puissance des médias sociaux et la facilité avec laquelle il est possible de diffuser de l'information d'un bon œil. «C’est ça qu’internet a donné à tout le monde, le pouvoir», explique celui qui s’intéresse depuis un certain temps à la propagande russe.
C'est bien beau tout ça, mais qu'est-ce qu'on peut faire pour repérer les fausses nouvelles?
D’abord, c’est une bonne chose de se tourner vers des médias d’information officiels et réputés. Ces derniers ne sont toutefois pas parfaits, souligne Jean-Hugues Roy. La semaine dernière, par exemple, le New York Times a été accusé d’avoir diffusé de la fausse information entourant le «convoi de la liberté» à Ottawa. Le réputé quotidien s'est depuis rétracté.
C'est d'ailleurs une des raisons pour lesquelles on peut se fier aux médias d'information: lorsqu'ils se trompent, ils admettent leur tort et corrigent leurs erreurs.
Jean-Hugues Roy appelle aussi à se méfier des adjectifs dérogatoires, qui sont souvent utilisés dans les fake news. Il faut aussi repérer les tournures de phrases du genre «ce qu’on vous cache», «les médias vous cachent ceci» ou «les médias n’en parlent pas».
Il vaut mieux s'informer en français
Bien que les fausses nouvelles traversent la barrière des langues, la désinformation se fait davantage en anglais qu’en français. Dans le cas de la guerre en Ukraine, des trolls russes pourraient chercher à partager des fausses informations pour déstabiliser les États-Unis et polariser les débats.
«Les Russes ont moins d’intérêt à le faire en d’autres langues [que l'anglais], [mais ils] le font aussi en France», explique-t-il.
Voici des exemples de fausses nouvelles
Une vidéo circule abondamment sur les réseaux sociaux actuellement. Elle montrerait un père de famille faisant ses adieux à sa femme et sa fille pour aller combattre les troupes russes.
Or, il s'agirait plutôt d’un père séparatiste prorusse de la région du Donbass qui fait ses adieux à sa famille qui retourne en Russie, selon le quotidien français Le Monde. Donc bien que la vidéo soit vraie, son contexte n'est pas le bon.
🇺🇦 That’s how a father in Ukraine sent his family to the safe zone and said goodbye to the camera.
— Ukraine News 🇺🇦 (@UkraineNews0) February 24, 2022
pic.twitter.com/hI2P30WAAZ
Cette vidéo intitulée Russia Fighter Jets on Ukraine F22 Raptor Vs Anti Aircraft Missiles montrerait un combat entre Russes et Ukrainiens. Il s’agit plutôt d'un extrait tiré du jeu vidéo Arma 3.
Un joueur aurait décidé de faire passer l’extrait, qui est très réaliste, pour un combat pour faire des clics.
Non, ces images diffusées sur TikTok ne montrent pas la ville de Kharkov sous les tirs des armées russe et ukrainienne. Un utilisateur a simplement ajouté aux images un filtre musical, que l’on peut entendre dans d’autres vidéos.
Et notez qu’elle a été diffusée le 14 février dernier, 10 jours avant le début de l'invasion russe en Ukraine.
Les mêmes sons ont d'ailleurs été utilisés dans une vidéo tournée dans un Costco au Mexique.
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