Angoissé par le manque de travail, Patrick Goyette a pensé tout arrêter et est même retourné aux études
Steve Martin
Après avoir joué dans Nous, Larry et District 31, le comédien et père de Maurice, Clément, Sacha et Frida enfile le costume d’un policier pour un nouveau polar inspiré d’un bouquin à succès de Jean Lemieux. Il nous raconte ce riche parcours qui l’a mené de la Mauricie d’Émilie Bordeleau aux Îles-de-la- Madeleine, ponctué de quelques détours en Pologne et au Japon.
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Patrick, tu as décroché un rôle dans Les filles de Caleb avant même d’avoir terminé le Conservatoire et tu as joué dans quelques séries d’époque à tes débuts, comme Ces enfants d’ailleurs et Shehaweh. On parle de grosses productions...
C’était l’époque des séries lourdes. Pour Ces enfants d’ailleurs, nous avons tourné durant un mois et demi à Cracovie, en Pologne. Il y avait des scènes de guerre avec des hommes sur des chevaux. Sur le plateau des Filles de Caleb, c’était fou. Des bâtiments complets avaient été construits pour les besoins de la série. Les gens allaient faire leurs emplettes avant la mise en ondes de l’émission, alors durant la diffusion, les magasins étaient vides! Ça ne se fait plus aujourd’hui.
Tu as aussi travaillé avec Robert Lepage. Tu as tenu le premier rôle dans ses films Le polygraphe et Le confessionnal en plus d’avoir voyagé au Japon pour la pièce Les sept branches de la rivière Ōta. C’était une période fertile!
Ç’a été toute une époque pour moi. Les sept branches de la rivière Ōta, c’est un projet que nous avons développé sur plusieurs années. La troupe était comme une famille pour moi, avec Anne-Marie Cadieux, Marie Brassard et toute l’équipe de techniciens. Nous avons été en tournée pendant des années. Quand nous sommes revenus à la maison, nous avons continué de nous tenir ensemble. Ç’a été aussi une période durant laquelle nous n’avions pas le choix d’apprendre à lâcher prise. On partait de rien. Robert avait une idée de scénographie, avec des pro- jections, un photomaton, des choses comme ça, mais pour ce qui est des dialogues, il fallait les improviser et on bâtissait autour de ça. C’était vraiment une création collective.
Ça doit être stimulant de participer à la création d’une œuvre en constante évolution!
Robert pouvait arriver un soir avec un texte qu’on devait faire traduire en japonais et que je devais apprendre pour une prochaine représentation. Même pour Le polygraphe, je me souviens d’avoir improvisé des dialogues le matin avec Marie Brassard, qu’on devait tourner l’après-midi. Si tu es malheureux dans un contexte comme celui-là, tu ferais mieux de te retirer. Pour que ce soit bon, il faut s’abandonner complètement.
Ton père était un homme d’affaires, concessionnaire automobile. Comment t’est venu le désir de devenir comédien?
Je voulais aller dans un domaine artistique. Comme j’aimais dessiner, je pensais me diriger dans la mode. Au cégep, je me suis retrouvé dans une école alternative avec des divans, mais pas de bureaux; on décidait de nos notes et tout ça. Ça se voulait humaniste comme mode de fonctionnement. Ça faisait partie de Dawson. Ça s’appelait le New School. Dans ma tête, je pensais que ça allait être comme l’école dans l’émission Fame, mais ce n’était pas tout à fait ça. (rires) Comme je ne savais pas trop ce que j’allais faire, je me suis ensuite inscrit au Collège LaSalle et j’ai suivi des cours de théâtre. J’ai monté une pièce de Sam Shepard avec des amis. Ç’a été une belle expérience. C’est là que j’ai eu la piqûre.
Est-ce que tu dessines toujours?
Un peu, pour le plaisir. Pendant un long moment, j’ai fait les costumes d’Halloween de mes plus vieux. J’ai suivi des cours de couture au secondaire, mais pendant des années, je n’avais pas accès à une machine à coudre. Et quand j’en ai trouvé une, il y a quelques années, je me rappelais encore comment faire. J’ai fait une robe pour ma fille. Je me sers de ma machine dans mes temps libres. J’aime la mode. Ce n’est pas un monde que je connais, mais quand c’est beau, c’est vraiment une forme d’art.
Pour plusieurs acteurs, le Conservatoire a été une période intense au point de vue humain. Qu’est-ce que cette expérience t’a apporté?
Ça m’a donné un cadre. J’étais passionné, mais il y avait beaucoup de choses que j’ignorais. Je ne savais même pas ce qu’était un agent. C’est quand j’ai joué dans Les filles de Caleb que j’ai été présenté à Lucie Robitaille par sa sœur. Elle m’a pris dans son agence. Aujourd’hui, les jeunes sont plus au courant de ce qui les attend. Apprendre le métier, ça m’a aussi permis de m’ouvrir émotivement. C’est quelque chose que je constate encore aujourd’hui, avec ma famille, mes enfants. Je prends mon frère dans mes bras, je l’embrasse. On ne faisait pas ça avec mon père. Ça m’a aussi amené à être curieux des autres. Mon métier m’a apporté cette ouverture-là.
Tu as déjà évoqué la difficulté liée à l’imprévisibilité de ton métier. Est-ce quelque chose qui t’inquiète toujours?
C’est certain que j’aimerais travailler davantage, mais j’ai moins peur de ne plus travailler aujourd’hui. J’ai même pensé quitter le métier. Je suis retourné à l’université pour étudier l’enseignement du français au secondaire. C’est certain que c’est un métier qui vient avec son lot de frustrations, mais je suis cool avec ça aujourd’hui. Je me dis: «Si ça arrête demain, ça aura quand même été quelque chose de vraiment important dans ma vie...» J’aime faire ça et je suis heureux de dire que c’est le métier que j’ai choisi.
Plusieurs enfants de comédiens décident de suivre les traces de leurs parents. Est-ce que tu as mis tes enfants en garde face à ça?
Jamais. À date, aucun de mes enfants n’a manifesté le désir de devenir comédien. Il faut dire aussi que je ne suis pas trop du genre à parler de mon métier à la maison. Je ne leur impose pas de venir me voir au théâtre, de regarder ce que je fais à la télé. Si ça les intéresse, ça va venir d’eux. Je ne veux pas qu’ils soient trop exposés à cette «lumière». Dans mon cas, c’est une petite lumière comparativement à des personnalités qui sont hyper connues, mais il y a quand même des gens qui me reconnaissent. Le danger pour des enfants, c’est d’avoir une certaine attention non pas pour ce qu’ils sont, mais parce qu’ils sont dans la lumière de leur mère ou de leur père connu. C’est important que chaque enfant ait sa propre lumière.
UN POLICIER RÉTICENT
Dans la nouvelle série Détective Surprenant: La fille aux yeux de pierre, nouveauté qui a connu un excellent départ lors de son premier weekend sur Club illico, Patrick Goyette incarne un policier qui n’est pas très pressé de se lancer dans l’enquête visant à élucider le meurtre d’une jeune femme, la fille du maire de Cap-aux-Meules, dont le corps a été retrouvé aux Îles-de-la-Madeleine. «Il y a une équipe de policiers autour de Surprenant, dont les personnages joués par Catherine Brunet, Nicolas Fontaine, Mikhaïl Ahooja et moi. Mon personnage, c’est le plus vieux du groupe. C’est celui qui essaie de convaincre Surprenant de ne pas trop s’en mêler parce qu’il y a un autre enquêteur, joué par Patrice Godin, qui arrive de l’extérieur pour prendre l’enquête en main.» Comme il avait déjà travaillé avec le réalisateur Yannick Savard, notamment sur la série Nous, le comédien a tenu à donner un peu de relief à son personnage afin d’expliquer la réticence que semble avoir le policier face à cette scabreuse affaire. «En fait, j’ai voulu l’aborder comme un gars qui a débarqué aux Îles avec un certain bagage. Il a une expérience du métier, il a vu des choses. Quand il réalise l’ampleur de la situation, il sait ce que ça peut impliquer sur le plan émotif. De ne pas vouloir embarquer dans cette affaire, c’est un peu une façon pour lui de se protéger. Je le vois comme quelqu’un qui a choisi de poursuivre sa carrière aux Îles-de-la-Madeleine parce que, dans son esprit, c’était une terre qui n’avait pas encore été souillée. J’ai décidé de le jouer comme ça.»
Détective Surprenant: La fille aux yeux de pierre est disponible sur Club illico.
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