Qu’est-ce que «Call Russia», cette campagne d’appels pour lutter contre la propagande russe?
Jean-Michel Clermont-Goulet
Quarante millions. C'est le nombre d’appels que souhaitent passer les personnes derrière l’initiative «Call Russia». Leur but? Informer 40 millions de Russes sur la guerre en Ukraine et contrer la propagande de Vladimir Poutine. Explications.
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L’initiative #CallRussia veut rassembler le maximum de volontaires russophones du monde entier pour contacter le plus de Russes possible, afin de contrer la désinformation entourant l’invasion de l’Ukraine par l'armée de Vladimir Poutine.
Pour ce faire, les bénévoles utilisent les numéros de téléphone russes tirés d’une base de données ouverte, par une plateforme en ligne. Sur le site web de l’organisation, les numéros sont distribués au hasard.
Des conseils sont d’ailleurs disponibles afin que le volontaire puisse ouvrir le dialogue et aborder correctement le sujet avec la personne au bout du fil.
«Les discussions directes sont le seul moyen de dire la vérité et de mettre fin à la guerre», peut-on lire sur le site web de Call Russia. «Vladimir Poutine a peur d’une seule chose — le peuple russe.»
Une mise en garde est d’ailleurs faite: ces conversations seront «incroyablement difficiles, compte tenu de la propagande et du manque d’information auxquels les Russes sont soumis».
Connecter avec de vraies personnes
Le processus peut sembler banal pour certains, mais, pour Lidia, une Russe qui vit maintenant au Royaume-Uni, c’est une «excellente façon» d’essayer d’établir un lien avec de «vraies personnes qui ont le pouvoir d’opérer des changements en Russie», a-t-elle déclaré à The Guardian.
Une bonne partie de la vingtaine d’appels que Lidia a passés se sont terminés brusquement: on coupait la communication dès qu'elle mentionnait l'Ukraine ou on lui faisait des remarques hostiles en lui demandant: «Qui, en Occident, vous paie?»
Elle confie toutefois être déterminée à continuer de téléphoner à des Russes pendant sa pause au travail ou lorsqu’elle revient à la maison.
«Je veux continuer, parce que je pense que le nombre est une force — plus vous en faites, plus vous avez des chances d’influencer le plus de gens possible», souligne la Russe de 29 ans. «Je crois fermement que la seule façon de renverser le régime de Poutine, c’est de l’intérieur.»
Une seconde initiative, Papa, pover!/Dad, believe! («Papa, écoute!» en français), a aussi vu le jour ces dernières semaines. L’accent est mis sur les relations familiales qui sont brisées en raison de la guerre et de la désinformation en Russie.
Des Russes vivant en Ukraine sont invités à contacter leur famille vivant en Russie pour leur expliquer la situation chez leurs voisins.
Désinformation et sanctions en Russie
En Russie, la guerre en Ukraine n’existe pas. Les médias d’État parlent plutôt d’une «opération militaire spéciale». D’ailleurs, ces derniers ne peuvent mentionner les mots «guerre» ou «invasion», à la demande de Vladimir Poutine.
Depuis le 4 mars dernier, toute personne, incluant les médias locaux ou étrangers, qui propage de la «désinformation» et qui ne se contente pas de transmettre les informations du gouvernement court de gros risques.
Elle peut faire face à une peine d’emprisonnement maximale de 10 à 15 ans et à une amende de 700 000 à 1,5 million de roubles (8400 à 18 000$), entre autres.
D’autres entreprises médiatiques ont choisi de cesser temporairement la couverture de la Russie et de retirer leurs correspondants, comme la BBC et, plus près d’ici, CBC/Radio-Canada.
– Avec les informations de The Guardian