100 millions de Canadiens: le Québec peut être un lieu d'intégration
![Photo portrait de Antoine Robitaille](/_next/image?url=https%3A%2F%2Fm1.quebecormedia.com%2Femp%2Femp%2FAntoine_Robitaille_404e0ae7d21-73b6-4d20-b859-f341e593b38d_ORIGINAL.jpg&w=3840&q=75)
Antoine Robitaille
Le ROC (Rest of Canada) est une nation qui aime à se dire «post-nationale» parce que cela fait son affaire. Et pourtant, elle défend ses intérêts... comme toutes les nations.
Or, le projet «100 millions de Canadiens en 2100» sert ses intérêts. Elle sait bien que 90 % ou plus des nouveaux arrivants s’intégreront en anglais. Donc pas d’inquiétude culturelle ici pour elle.
Pour le Québec, évidemment, cela pose un défi sérieux. Qu’on ne peut aborder uniquement sous l’angle de la «protection». Il faut aussi le faire dans l’ouverture et la promotion de cette même identité.
Chaque fois qu’il parle d’immigration, François Legault se montre malhabile: il enchaîne systématiquement en parlant des périls dans lesquels cette situation met le Québec.
Il occulte ainsi une belle tradition québécoise qui a eu de grands succès et qui est porteuse d’avenir: l’idée que le Québec soit un creuset. Autrement dit, un lieu d’intégration.
Grâce à la loi 101, cela a passablement fonctionné. Cette loi a permis de désethniciser le français; a rendu plus courant le fait de partager cette langue des descendants de la Nouvelle-France avec les nouveaux arrivants qui, autrement, «systémiquement», étaient poussés vers l’anglais.
- Écoutez Monsef Derraji, député de Nelligan pour le PLQ en entrevue au micro d' Antoine Robitaille, disponible en balado sur QUB radio :
Couture
Autre aspect du «creuset» moins connu: l’action de Jacques Couture, qui fut ministre de l’Immigration dans le gouvernement Lévesque.
![Jacques Couture, qui fut ministre de l’Immigration dans le gouvernement Lévesque.](/_next/image?url=https%3A%2F%2Fm1.quebecormedia.com%2Femp%2Femp%2FCapture_d_e_cran_le_2023_05_09_a_08.31.38fa71bd44-9cbf-4e4d-8198-2566f813eaa9_ORIGINAL.jpg&w=3840&q=75)
Couture a réussi à signer la première entente avec le fédéral permettant au Québec de «déterminer ses propres critères de sélection en fonction de ses objectifs économiques, démographiques ou socioculturels». (Je cite l’historien de l’Université Laval, Martin Pâquet)
L’entente Cullen-Couture, comme on l’appelle, a permis d’affermir le creuset québécois: «Notre projet collectif, affirmait le ministre Couture en 1978, ne peut pas faire abstraction de ce demi-million de Québécois qu’il faut associer à part entière au mouvement historique du peuple québécois vers son plein épanouissement».
L’ensemble des Québécois doit se sentir responsable «de l’insertion des immigrants à la vie québécoise», disait-il.
C’est à Couture qu’on doit le programme de parrainage des réfugiés (qui implique des citoyens directement).
- Écoutez l'entrevue de Caroline Proulx, ministre du Tourisme au micro d' Antoine Robitaille, disponible en balado sur QUB radio :
Il organisa l’accueil des «Boat people» vietnamiens, grâce auquel le patronyme Nguyen est un des plus courants au Québec aujourd’hui.
L’historien Éric Bédard, qui recevra ce soir à Montréal* l’universitaire Catherine Foisy pour discuter de la vie et de l’œuvre de Jacques Couture, me soulignait dimanche ceci: notre Kim Thúy «nationale» est arrivée au Québec à 10 ans, à Granby. Et a pu devenir une grande auteure québécoise.
On peut et doit être vigilants quant à l’Initiative du siècle, mais nous ne devrions pas oublier les chances que procure l’immigration.
Il faut aussi que notre État soit audacieux (loi 101 au Cégep!) et utilise tous les outils à sa disposition. Le Journal révélait récemment que le Québec a le pouvoir «d’imposer des exigences linguistiques à l’admission des travailleurs et des étudiants étrangers». Or, la ministre Christine Fréchette n’utilisera pas ces leviers dans sa réforme de l’immigration.C’est déplorable.
*Dans le cadre des conférences, les Figures marquantes de la solidarité, organisées par la Fondation Lionel-Groulx.